La Maison des Arts et de la Culture à Beyrouth, un projet emblématique

Publié le 29 mars 2011 par Libalel
Entretien avec Dima Samaha, coordinatrice générale de Gaia Héritage
Sous l’impulsion du Ministère de la Culture Libanais et financé par le Sultanat d’Oman à hauteur de 20 millions de dollars, le quartier Ghalghoul de Beyrouth va voir naître la « Maison des arts et de la Culture », une première au Liban. Pour sa construction, un concours international d’architecture a été organisé et remporté par le milanais Alberto Catalano. D’une surface totale de presque 20.000 m2, la nouvelle MAC sera composée d’un auditorium flexible de 800 places, d’une salle polyvalente (black box) de 300 places, d’une salle de cinéma de 200 places, d’espaces d’exposition, de studios de répétition, de cours et de production, d’une médiathèque, d’une cinémathèque, de bureaux et d’espaces commerciaux. Fin du chantier prévu en 2014.
Dima travaille à la coordination de GAIA-Héritage, structure spécialisée en ingénierie culturelle, et choisie comme consultant du Ministère de la Culture au Liban pour la conception de la Maison des Arts et de la Culture.

D’abord, pourquoi une Maison des arts et de la Culture à Beyrouth ? Quelles sont ses principaux objectifs et ses missions ?
La MAC est une première dans son genre au Liban et dans le Monde arabe. Elle a pour mission première d’être un incubateur de la créativité, de l’art contemporain dans la région, de réunir les acteurs de la vie culturelle, de leur donner les moyens et l’espace nécessaires pour développer leur projet. La MAC entend de même faire de Beyrouth, à travers cet incubateur une capitale artistique majeure, liée aux autres lieux où se fait aujourd’hui l’art contemporain. La MAC sera donc un espace mais aussi une vitrine pour les artistes de la région.
Qui aura la charge de définir le programme artistique ?
Le MAC sera une structure publique dotée de l’autonomie de fonctionnement. Son  programme artistique se fera par son conseil et sa direction générale et artistique. Gaia a organisé le concours d’architecture et dans le cadre de cet évènement international qui a vu 767 inscriptions et 388 projets soumis du monde entier entrer en compétition, Gaia-heritage a mis en place un jury composé  d’architectes et de critiques d’art internationaux de haut niveau. Pour la programmation artistique Gaia s’entoure déjà de spécialistes en scénographie, arts de la scène, acoustique, organisation et programmation d’évènements culturels.
Comment la MAC sera-t-elle organisée au niveau interne (équipe, mode de fonctionnement etc.) ?
Le montage institutionnel et l’organigramme seront préparés durant la phase de construction.
Le projet a été initié par le Ministère de La Culture, quel est son rôle dans la mise en place du projet et dans son futur fonctionnement ?
Dans ce projet financé par le Sultanat d’Oman, le Ministère de la Culture est le client. Le financement a été obtenu du Sultanat d’Oman lors d’une visite officielle du Premier Ministre en Oman au cours de l’année 2006. 

Les galeries d’art sont les acteurs principaux de la scène artistique à Beyrouth, comment se place la MAC dans un tel paysage ? Ces acteurs artistiques et culturels ont-ils été impliqués dans la conception du projet ? et quels rôles auront-ils ?

Les galeries d’art et les associations sont en effet aujourd’hui les acteurs principaux. Le rôle de la MAC sera de soutenir leur travail et de contribuer à stimuler le secteur artistique libanais. La MAC ne remplacera jamais le secteur privé et associatif ; au contraire, il mettra à sa disposition des équipements que le secteur privé ne peut pas développer de lui-même. La MAC entend impliquer ces galeries et associations qui ont développé un savoir-faire, une connaissance et une expérience inestimable de la vie artistique et culturelle libanaise.

La MAC souhaite développer son réseau régional et international, comment cela va-t-il se concrétiser ?
A travers une très forte coopération avec les centres similaires internationaux. Nous sommes déjà en contact avec un certain nombre d’entre eux. Nous souhaitons bénéficier de leur expérience, leur expertise et mettre en place une veritable coopération, un échange par l’organisation d’expositions et de spectacles communs, de résidences d’artistes, de conférences.
Que peut apporter la Maison de la culture aux jeunes artistes ?
Un espace d’expression, de formation, de répétition, et de représentation. Un espace également pour se rencontrer, se côtoyer et rencontrer le public libanais. La MAC apporte les moyens dont ces artistes ont besoins et dont ils ne bénéficient pas nécessairement. Un réseau de contacts et une vitrine sur l’étranger. Un espace, des moyens, un réseau, une vitrine et aussi une équipe qualifiée.
Alors que le secteur artistique est très peu soutenu au niveau public, penses-tu que cette initiative du Ministère de la Culture pourrait être l’amorce d’une véritable politique culturelle au Liban ?
Oui, ce projet, s’il aboutit, constitue un premier pas important qui vise à remettre l’Etat dans le circuit de la politique culturelle libanaise. La MAC n’a pas pour objectif une fois sur pied d’écraser ou d’écarter les initiatives individuelles qui ont vu le jour au sein d’associations, ONG, fondations, galeries ou autres, bien au contraire. Elle entend les booster et pallier au manque de ces structures.

Ce projet a suscité un certain scepticisme et des réserves sur la réalité des engagements du Ministère mais aussi sur le futur mode de fonctionnement de cette structure. Peux-tu m’en dire un peu plus ?
Il est normal qu’un projet pareil suscite scepticisme et doutes. Les artistes libanais ont jusqu’à présent dû développer et concevoir leur projet, trouver des financements, sans aide financière ou logistique véritable de l’Etat, avec les moyens de bords, l’aide surtout d’acteurs culturels parallèles. L’arrivée du Ministère dans le paysage culturel va nécessairement être empreint de doutes. Mais le sérieux, le professionnalisme et la rigueur avec lesquels la MAC a été et est en train d’être conçue balayera naturellement ce manque de confiance. Les artistes auront un rôle majeur à jouer dans le fonctionnement et l’existence de la MAC. Nous allons donc les impliquer, car sans eux cette maison n’a pas de raison d’être.
Quelles sont les prochaines étapes du projet ?
Les étapes à venir sont avant tout de conclure la signature des contrats qui lient les différentes parties, a savoir architectes, ingénieurs, client et maitre d’ouvrage. Par la suite obtenir et formaliser le permis de construire. Commencer la construction et parallèlement débuter la mise en place de la programmation artistique, du recrutement du personnel etc. L’ouverture est prévue courant 2014.
Entretien réalisé par Barbara Coffy
Plus d’infos_____________________________________________________________
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Le site du concours d’architecture