Salle 5 : vitrine 4 - metchetchi : 3. a propos de la catégorie sociale des khentyou-she ...

Publié le 29 mars 2011 par Rl1948

   Mardi dernier, souvenez-vous amis lecteurs, je vous ai entraînés dans un certain nombre de considérations philologiques et calligraphiques à propos de deux titres attribués à Metchetchi, ce haut fonctionnaire à la cour du pharaon Ounas de la Vème dynastie (Ancien Empire) en vous promettant - et ce sera le but de notre rendez-vous d'aujourd'hui - d'aborder d'une point de vue historique et social la fonction de khenty-she.


   Il faut savoir qu'à l'Ancien Empire, à la Vème dynastie - mais assurément déjà sous Snéfrou, à la précédente, si j'en crois les assertions avancées par l'égyptologue française Madame Paule Posener-Kriéger dans sa remarquable étude des archives du temple funéraire de Neferirkarê-Kakaï à laquelle j'avais il y a pratiquement un an consacré quelques lignes -, on donnait le nom de khentyou-she à deux catégories distinctes de personnages : les uns étaient attachés au complexe funéraire royal et, comme nous l'avions vu avec Qar Junior rencontré l'année dernière dans la nécropole d'Abousir fouillée par les missions égyptologiques tchèques, ils assumaient les tâches les plus diverses pour assurer le meilleur fonctionnement à ce domaine : cultivateurs, administrateurs du temple, prêtres, etc.

   Les autres, serviteurs palatins, avaient en charge la protection du roi, sa toilette, sa garde-robe, ses loisirs musicaux, l'approvisionnement de ses repas et, surtout, un certain nombre de tâches administratives, comme par exemple celles de gardien du sceau du palais, de chef des documents relatifs au domaine royal, etc.

   Cela posé, bien qu'assumant des fonctions au départ distinctes, les khentyou-she du palais, membres de l'Administration centrale, bénéficiant assurément d'un statut privilégié par rapport à leurs homologues du domaine funéraire royal, pouvaient aussi parfois être requis pour s'occuper de la gestion cultuelle du temple ; ce qui, par parenthèse, n'était pratiquement pas possible dans l'autre sens.  

     Tous vivaient dans ce qu'il est convenu d'appeler une "ville de pyramide", c'est-à-dire des installations dont la superficie pouvait varier entre 150 et 400 mètres de côtés  - celle de Mykérinos, à Guizeh, mesurait 150 x 180 mètres -, qui soit, se situaient autour du temple-bas (ou temple de la vallée), au titre de centre cultuel, soit dans le périmètre du palais royal - la Résidence, comme le notent les textes -, selon les besoins administratifs et privés du souverain.

     Les premières "villes" connues de ce type furent celles de Snefrou, à Meidoum et à Saqqarah : elles abritaient à la fois de très hauts fonctionnaires auliques issus de sa propre famille - princes et enfants royaux promus prêtres, prophètes ou administrateurs du complexe funéraire - mais aussi des "employés", les khentyou-she du linteau (E 25681) de la première des deux vitrines 4 de la salle 5 du Département des Antiquités égyptiennes du Musée du Louvre, devant lequel, ce matin encore, nous nous retrouvons, et qui pouvaient tout aussi bien être cultivateurs qu'artisans ou policiers du désert destinés à garder l'agglomération. 

     Mererouka, gendre et vizir du roi Téti au début de la VIème dynastie, dont j'ai eu souvent sur ce blog l'opportunité de citer le nom, portait également parmi ses quelque 80 titres réels et honorifiques, celui de khenty-she de la ville de la pyramide de son souverain.

     Selon Madame Posener-Kriéger, qu'ils gèrent les biens du palais ou ceux d'une pyramide, beaucoup d'entre eux furent khentyou-she de manière héréditaire, voire même désignés comme tels dès leur naissance : en effet, un grand nombre porte un patronyme dans lequel figure celui du souverain et ce, parce qu'ils étaient nés sur  un de ses domaines qu'un jour ils géreraient éventuellement ...

     La fonction, vous l'aurez compris amis lecteurs, fut d'importance  pour certains  dignitaires de l'Ancien Empire. C'est à ce point vrai qu'est exposé au Museum of Fine Arts de Boston, sous le numéro d'inventaire 68.115, un sceau-cylindre ayant appartenu à un khenty-she de la pyramide de Djedkarê-Isési, pénultième souverain de la Vème dynastie : il est tout simplement en or !

   C'est donc - et je reviens à lui - l'ensemble de ces serviteurs attachés à la personne d'Ounas que, selon ce que "disent" différents monuments, Metchetchi dirigeait.

   A présent que nous avons un peu mieux compris en quoi consistait  la vie professionnelle de ce haut fonctionnaire de l'Etat, je vous propose de nous retrouver mardi 5 avril prochain pour ensemble découvrir ce qu'à l'Ancien Empire, l'on entendait précisément par la notion d'imakhou ..., épithète, souvenez-vous, qui figure également gravée sur les monuments de Metchetchi. 

A mardi ...

(Baud : 1996, 13-49 ; Posener-Kriéger : 1976,  576-81 ; Stadelman : 1980, 65-77)