Dans "Les Yeux de sa mère", son dernier film, Thierry Klifa réunit Catherine
Deneuve, Géraldine Pailhas, Marisa Paredes et Nicolas Duvauchelle pour nous emmener au bout de l'émotion.
Une oeuvre menée avec un brio à couper le souffle.
Sur un scénario taillé au scalpel par le réalisateur lui même et son acolyte Christopher Thompson, des secrets, des trahisons, des jeux de hasard et des
punitions du destin ponctuent le parcours de deux femmes et d'un ado, tous aux prises avec un métier flirtant avec la célébrité qui les passionne et pour lequel il y eut parfois des sacrifices
commis.
Pour résumer le film, il est dit : Un écrivain en mal d'inspiration infiltre la vie
d'une journaliste star de la télé et de sa fille danseuse étoile pour écrire à leur insu une biographie non autorisée.
Cependant je trouve ce propos trop restrictif. D'abord l'écrivain n'est pas en mal
d'inspiration mais il vit mal son inspiration tournée pour l'heure vers le sordide. C'est un détail ; il prend néanmoins une place énorme dans les aventures de nos
héros...
Catherine Deneuve en reine chazalienne du JT joue là une partition sans faute, en pudeur, avec une profondeur très personnelle dans le sens où elle donne vraiment une part de son intimité en
revêtant les habits de cette journaliste cabossée, experte en communication et si peu douée pour exprimer ses sentiments.
"La Paredes", - sans crise de nerfs - elle aussi plus sobre que dans les films
d'Almodovar dont elle fut la vedette, interprète une femme attentive, bienveillante, équilibrée, qui de sa force soutient les autres.
Enfin Géraldine Pailhas, l'actrice fétiche de Klifa, qui habite chacune de ses
compositions, bouleversante de grâce, d'enthousiasme, de sincérité, de passions et de doutes, très Callas et Piettragalla, subjugue littéralement avec un naturel
désarmant.
Toutes sont formidables. Deneuve trouve là son meilleur rôle depuis longtemps bien
qu'elle les transcende tous avec talent. Tous, Duvauchelle en tête sont épatants, intenses, tourmentés, attendrissants, drôles.
J'aime Klifa ! ou plutôt j'aime tous les films de Klifa. Et tous ceux aussi que dialogue
Christopher Thompson.
Les films de Klifa, quel voyage, quelle tendresse, quel humour !
"Une vie à t'attendre" avec G. Pailhas, N. Baye, P. Bruel, le "Héros de la famille",
avec Catherine Deneuve, Emmanuelle Béart, Gérard Lanvin, Miou-Miou, Brasseur et Co m'ont vraiment marquée.
Avec une mention spéciale pour les reprises des chansons "Pour une amourette", "The
Rose" (pour les deux premiers films) et de "Ma fille" (pour ce dernier), qui prouvent que Klifa sait vivre. Il ne raconte pas des histoires pour fantasmer et se complaire, il aime les gens, les
gens qui ont roulé leur bosse, il aime la vie. Coté coups et coté câlins. Avec des rires et des pleurs. Beaucoup de pleurs, comme dans tout mélo qui se respecte et un genre qu'il affectionne
particulièrement et à raison, puisqu'il y excelle...
Bref j'aime. Et quand j'aime, je prends un abonnement au cinéma du
coin.
"Les Yeux de sa mère" sont à voir et revoir donc. Sans modération.
En salle, depuis le 23 mars.