Le fils de l'ours père est un livre.C'est un livre et pourtant il n'y a aucun mot.Pas de mots, uniquement des images.Et l'histoire se déroule au travers de ces images, silencieuses, sans nul son pour édulcorer la terrible existence du fils de l'ours père.
Le fils de l'ours père relate donc de façon purement visuelle l'existence de l'ours et son histoire, très humaine...Au travers d'un dessin particulièrement personnel, Nicolas Presl nous invite à partager toute la violence de l'existence d'êtres simples dont les espoirs se transformeront en calvaire.Il nous force à ouvrir les yeux, en grand ; à accepter ce que nous voyons et nous oblige à suivre sans que nous ne puissions jamais avoir le choix les angoisses, les questionnements et les accès de démence de l'ours, celui dont la mère est femme et dont le père, mort, était ours.
Quelle place a-t-il dans la société ? Quelle place peut-il obtenir, lui qui n'est ni homme, ni ours et pourtant les deux à la fois ?
Quelle place peut-il donner au chasseur qui aima puis tua son ours de père ? Que peut-il accepter de cet homme, qui est l'époux légitime de sa mère ?
Le fils de l'ours père est très certainement un roman existentialiste.Il pose la question centrale du choix pour un être qui n'a certainement pas choisi de vivre ainsi, fruit du malheur et d'un moment d'oubli.Mais plutôt que de s'enliser sur les problèmes de la tolérance de la société vis à vis du métissage, il s'en sert comme terreau pour donner de la profondeur à son personnage et l'obliger à rechercher au plus profond de lui ses propres racines, celles que personne ne lui accordera jamais... à part son père...
Il est certain que j'ai été très touché par l'incroyable richesse de cette histoire muette. Le graphisme, incroyablement riche et précis, offre la possibilité de contempler l'esprit des personnages. Puis, de les accompagner dans leur cheminement psychologique pour sombrer et se relever en même temps qu'eux.
C'est un roman redoutable.C'est puissant.C'est ancré dans la terre.
Le fils de l'ours père, les liens du sang, par Nicolas Presl
[François Nicaise]