26 mars 2011
Defred, c’est elle, la servante écarlate. Elle et tant d’autres qui vivent cachées dans les maisons des beaux quartiers, qui survivent à la loi implacable de ce régime totalitaire, dans lequel les femmes sont considérées comme des objets. L’action se déroule dans une époque futuriste, après une révolution et des batailles qui ont changé l’ordre des choses, et notamment la place de la femme dans la société. Ils y a Les Epouses, femmes vieillissantes des hommes qui dirigent le pays et qui règnent sur leur Maison, les Marthas, qui font cuisine et ménage, et les Servantes, dont le rôle est de procréer. Les autres femmes, trop âgées ou stériles sont déportées dans les colonies lointaines où elles manipulent les déchets toxiques.
La servante écarlate, c’est donc un ventre, un ventre qui doit s’arrondir grâce à un beau rejeton procréé par le maitre des lieux, un ventre qui doit remplir son office sous peine d’être punie… Defred se cache derrière sa cornette blanche et ses vêtements rouges de la tête aux pieds, uniforme qu’elle n’a pas le droit d’enlever. Elle accomplit sa tâche telle une somnambule, ne cherchant plus à savoir ce qui est bon, juste, bien ou mal. Elle cherche en elle la force de continuer, donnée par ses quelques souvenirs épars qu’elle arrive parfois à saisir au vol. Sa mère, sa fille. Des instants de bonheur avec son compagnon. Car il fut un temps où elle était autre chose qu’une Defred, qu’une matrice, il était un temps où on était libre, où on avait le droit de lire, de parler, de vivre et de s’habiller comme on l’entendait. Une époque où elle avait un prénom à elle, une famille, un foyer, un travail, une époque où l’amour était possible…
Car maintenant, plus d’amour. Seulement des rôles à jouer, des tâches à accomplir. Et toujours cette soumission à l’ordre, à l’homme qui doit l’ensemencer, à l’Epouse qui la jalouse et qu’elle craint plus que tout, aux gardes… Elle doit même se méfier des autres servantes, ses sœurs dans la douleur, de peur que l’une d’elle ne soit là pour espionner, rapporter.
Son devoir de procréation la protège pour l’instant de malheurs supplémentaires. Car cette société terriblement hiérarchisée, organisée manque d’enfants, cruellement. Probablement du fait de la pollution, les taux de natalité ont chuté et c’est sur elle et ses consœurs qu’on compte pour faire naitre des bébés sains. Mais quand chaque mois vient le sang, rouge lui aussi, c’est un désespoir supplémentaire, une humiliation de plus…
Je ne peux que vous conseiller de vous précipiter sur ce roman, qui est absolument passionnant de bout en bout. Vous serez, comme moi, terriblement émus par le sort de cette femme, vous serez révoltés contre ces lois inhumaines, vous serez affolés par cette société dans laquelle les femmes sont devenues objets. Un roman magistral, remuant, qui fait réfléchir sur notre sort à tous – et surtout à toutes.
Lecteurs répertoriés chez Bob. On en parle aussi chez Biblioblog, Grominou, Chiffonnette, Mango, Cynthia, Sentinelle, Voyelle & Consonne...
Un grand merci à Anne-Sophie, membre du Prix Quoi de 9, pour le prêt de ce roman !
Tags : enfant, folie, politique
- Le ventre de la fée - Alice FERNEY
- L'effet Larsen
- Le silence de Clara
- Les lieux sombres
- L'étrange disparition d'Esme Lennox