Hein ? Fut ma première réaction en lisant ce titre d’une dépêche lorsque je consultai un article du Figaro… Des Roms chassés avec un bulldozer (Flash-Actu du Figaro 25 mars 2011). Je pensai que les pouvoirs publics et les forces de l’ordre n’avaient pas encore reçu le message donné dernièrement par le Conseil constitutionnel.
C’est encore pire si je puis me permettre puisque c’est bien la direction de l’hyper-marché Leclerc de Nantes (au Paridis) - génial pour la pub ! j’espère que le buzz négatif va marcher un max… cela ne fait que commencer, je viens de l’entendre sur France Info ! nul doute que ce sera repris par d’autres radios, télévisions et d’autres titres de la presse – qui a organisé hier matin l’expulsion manu militari – avec un bulldozer – de deux familles de Roms et trois caravanes d’un terrain vague – qui appartiendrait à Leclerc, va savoir… - coincé entre le Leclerc et un Décathlon. Ils n’y sont pas allés avec le dos de la cuiller et ce lors même que les mères étaient absentes au moment de leur intervention.
Quand le bulldozer est arrivé, il a poussé de la terre vers les caravanes et puis tout contre l’une d’elle où étaient les deux plus jeunes enfants (6 ans et 3 ans) qui ont eu très peur. C’est un des deux garçons de 13 ans qui a dû tout seul faire sortir ses petits frères pour les mettre sur le côté, loin de l’engin.
Ensuite, les “hommes de main” de Leclerc – ne croyez surtout pas que je choisisse mes mots au hasard ! – de douze à quinze hommes (selon les sources) salariés du Centre Leclerc en costume, accompagnés d’un petit chauve à lunettes qui s’est présenté comme «le chef de l’hypermarché» ont soulevé la voiture et deux des cara-vanes (la troisième, ils n’ont pas pu : elle est destroy) pour les poser sur un petit trottoir à l’extérieur du terrain que le bulldozer a ensuite complètement retourné pour être certain que les caravanes n’y puissent être réinstallées.
Saban Laisor (17 ans) qui était au lycée n’a pu que constater les dégâts à son retour ainsi que l’agressivité des membres du personnel de Leclerc qui leur disaient «Il faut y aller maintenant, on va vous aider à sortir»… Aide des plus curieuse, en effet ! 12 contre 4 enfants… Quelle bravoure, quel titre de gloire ! Pourquoi songeais-je à un titre de film : «Les 12 s***» ? Des salariés ou des cadres prêts à tout pour complaire à leurs patrons, c’est tellement courant de nos jours. Vous inquiétez pas, les p’tits loups : quand il vous virera, il n’y aura personne pour prendre votre défense.
Les deux familles ainsi que l’association solidaire Roms Nantes-Est envisagent de porter plainte contre la direction du centre Leclerc. La loi est en effet formelle : il ne saurait y avoir d’expulsion – que ce fût d’un logement ou d’un terrain vague - qu’ordonnée par la justice et en présence d’un huissier et d’un officier de police… Point ici n’étaient présentes les forces de police puisque la maréchaussée n’est venue constater le forfait qu’à la suite de l’appel de témoins.
En outre, selon un adage bien connu «nul n’est censé se faire justice soi-même». Il ne suffit pas d’être dans son bon droit, encore faut-il agir avec l’autorisation expresse d’un magistrat sinon c’est la meilleure façon de perdre le meilleur procès du monde. Chose qu’il est fort mal aisée de faire comprendre à grand nombre de personnes : «Je suis dans mon droit»… Fort bien mais en agissant sans jugement vous vous mettez précisément “hors la loi” et c’est tout bénef pour votre adversaire. «Sed lex dura lex».
Selon ce qu’écrivent Agnès Clermont et Jacques Sayagh (Ouest-France, 25 mars 2011) Nantes. Leclerc aurait-il expulsé les Roms lui-même ? qui rapportent les propos de l’aïné : «Les gens du Leclerc sont passés nous voir il y a trois jours. Ils ont montré une photo de bulldozer à nos mères. Elles n’ont pas compris. Et aujourd’hui, ils sont revenus vers 10 h-11 h pour fermer le camp, en poussant la terre avec les bulldozers, justement». Mais présenter une photo de bulldozer ne vaut pas “papier bleu” (exploit d’huissier).
Christophe Sauvé, aumônier des gens du voyage, vice-président de l’Association nationale des gens du voyage catholique, était indigné hier soir, au téléphone : «Je suis derrière le Leclerc Paridis, on est en train de chercher des solutions pour ces familles. Quand je suis arrivé tout à l’heure, leurs caravanes étaient sur le bord de la route».
Leclerc, aussi bien au niveau de l’enseigne nationale que de l’hyper nantais refuse de communiquer. S’atten-daient-ils à ce qu’il n’y ait pas de vagues ? Je suppose que cela ne les a pas empêchés de dormir hier soir. Pour avoir des “états d’âme”, encore faut-il en avoir une…