Vik Muniz : Waste Land, une belle leçon de vie…

Par Artilt

Par Fabienne

De la poubelle au musée, en passant par le ciné ! Le travail de Vik Muniz devient le sujet d’un documentaire actuellement au cinéma : Waste Land, une aventure sensible, critique, humaine et artistique… Un film à voir !

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Vik muniz, je l’évoquais dernièrement, fait partie des artistes présentés à la Maison Rouge à l’occasion de l’exposition « Tous cannibales » . Aujourd’hui son travail est à nouveau mis en lumière, mais au cinéma cette fois ! Waste land, tout comme les deux précédents sujets cinéma abordés ici, est un documentaire. Après vous avoir parlé de « Faites le mur ! » de Banksy qui a su porter un regard très critique sur le marché de l’art, du Women are heroes de JR lequel a mis en lumière des femmes au courage extraordinaire, nous sortons ici du contexte street art, tout en conservant l’oeil averti de l’un et la vocation « humaine » de l’autre…

Lucy Walker réalise avec ce documentaire un splendide et poignant témoignage sur le travail de l’artiste, lui-même issu des quartiers pauvres. On apprend comment un accident lui a donné l’opportunité de quitter ce monde, pour finalement avoir le parcours artistique qu’on lui connait.
Waste land retrace trois années de la vie et de l’œuvre de l’artiste brésilien, le suivant de Brooklyn, son lieu de résidence actuel, aux banlieues de Rio de Janeiro. Là il va s’adonner à son art dans la plus imposante décharge du monde : détourner, complètement transformer les matériaux trouvés sur place. Ils vont devenir matière composante de gigantesques mises en scène souvent en référence à une imagerie populaire ou issue de grandes œuvres de l’histoire de l’art.

…Comme par exemple celle qui est présentée à la Maison Rouge : le Saturne dévorant son fils de Goya, revisité avec des déchets…


Saturne dévorant son fils, vu par Francisco de Goya et revisité par Vik Muniz.

Vik Muniz rencontre les « catadors » (trieurs de déchets), les fait poser et participer activement aux compositions à base de déchets qui seront pour finir, immortalisées en photo. Chacun lutte ici pour conserver une vie décente, organiser son quotidien et gagner honnêtement sa vie… C’est une magnifique leçon de vie, d’un point de vue humain mais pas seulement…Une prise de conscience sur les pendants oubliés de notre société de consommation, ici on ne parle pas de déchets mais de matériaux recyclables… Et si Vik Muniz donne le temps d’une photo une autre vocation aux poubelles, cette expérience dépasse complétement le simple fait artistique. Elle va également bouleverser la vie et la perception du monde qu’ont ces trieurs.


© Vik Muniz, La mort de Marat, d’après David, Junk Series, 2005.

Notre retour sur « Waste Land » ?

Au sortir de la salle de cinéma il me semblait évident que j’aurai plein de choses à dire, trop…
Arrivée devant le clavier, je constate qu’en effet sans doute trop de choses à dire pour arriver à les organiser avec aisance : le titre ne ment pas, il nous plonge dans la plus grande déchetterie du monde. Mais cette plongée se fait sous tellement d’angles, qu’il devient difficile de se limiter à parler du résultat final seul. L’œuvre devient un prétexte à une réelle et particulièrement riche expérience humaine. L’envie de créer est un des multiples moteurs, la rencontre prend elle, une place prépondérante et l’autre n’est pas seulement là pour servir la cause artistique. On suit les différents personnages, on s’y attache avec sincérité, on sourit, on s’émeut… Le parcours de chacun n’est pas tronqué, leur histoire construit pleinement le résultat, et cette participation à l’oeuvre influe de façon irréversible sur chacun, l’artiste tout comme ses modèles devenus apprentis/assistants le temps de cette série ne sortent pas indemnes de l’aventure. Et si Vik Muniz interroge le monde avec son oeuvre, il n’en porte pas moins un regard critique sur son art, son marché, notre société et ses rouages…

Oui, il s’agit bien d’un documentaire, mais ce qu’on y découvre est bien loin d’un registre contemplatif, ou objectif et distant : on s’y plonge, je n’irais pas jusqu’à parler de s’y noyer,
car il reste bien impossible d’oublier le matériau de base. Celui qui va très justement inciter Vik Muniz à revenir vers son Brésil d’origine.

Il est également difficile de mettre totalement de coté la petite pensée pour le documentaire de JR, le cadre et le sujet sont finalement relativement proches… Evidemment artistes et créations sont dans des registres éloignés, mais si l’on aborde la question du traitement global nous tombons alors radicalement dans l’opposition, si pour le premier l’œuvre et l’esthétique ont très largement été privilégiés, le second se veut plus sobre dans l’étalage de belles images, mais à su s’enrichir d’une palette émotionnelle indéniable. Et l’on en arrive très vite à attendre des résultats, à espérer que cette expérience artistique ne reste pas sans conséquences sur les protagonistes, un souhait qui sera exaucé…

Mais… chut, je n’en dis pas plus : déplacez-vous et donnez-nous vos impressions, si je réussis ma petite mission du soir en étant convaincante… Vous découvrirez pourquoi « 99, c’est pas 100″ …