Vendredi dernier, An Pierlé donnait un concert au Rocking Chair, à Vevey. C’était un peu l’occasion à ne pas manquer étant donné que ses CDs résonnent dans le salon familial depuis plusieurs années, inlassablement et toujours avec cette énergie contagieuse dedans. Même que pour le coup, même Maman était au taquet. Mais le mieux, c'est que juste avant que se confirme en live le talent de belge blonde, TEA l'a rencontrée. Conclusion : quand je serai grande, je veux être comme elle, faire de la musique avec mon mec, partir en tournée en mobile home, expérimenter tout un tas de trucs et manger des tonnes de chocolat. C’est un peu parfait comme vie.
INTERVIEW AN PIERLE
Hinterland est sorti en 2010 et après une longue pause, te voilà de retour sur scène. How does it feel ?
How does it feel ? Haha. Ca fait du bien! Pendant 12ans on a enchainé tournée/création/album. Au bout d’un moment, tu n’as plus de vie sociale. Il te faut des moments pour te renouveler, pour prendre du temps pour découvrir de nouvelles choses, lire de bons bouquins, faire des choses qui demandent plus de concentration. En tournée, tu peux pas lire des trucs très poussés. Dans le tour bus par exemple…on regarde plutôt des films comme l’Âge de Glace.
Donc on avait vraiment envie de faire une pause. En plus, Koen (son mec/son guitariste, ndlr) avait du travail de production à faire à côté. Du coup on a prit une année off, pour pouvoir jouer sans pression, sans vraiment de but.
C’est très important de faire ça parce que la musique que tu fais avant tes 18 ou 20ans, tu ne la fais pas dans le but de faire un album. Ou peut-être si. Mais généralement tu fais juste de la musique parce que ça te plait. Bien sûr, tu travailles déjà pour avoir un résultat mais ça reste très personnel, c’est toute la période vécue jusque là que tu peux distiller. Du coup, les premiers albums c’est souvent un peu la base, un concentré, un noyau…Et puis tu en fais un 2e et alors soit tu fais exactement la même chose et ta carrière s’arrête là, ou bien tu continues à explorer.
Le 3e est plus dur à faire ?
Pas pour nous en tout cas. C’était le premier (le "An Pierlé and The White Velvet, ndlr) qu’on faisait vraiment à deux à la maison mais avec plein d’arrangements. On avait envie de faire quelque chose de grand, de travailler avec un orchestre. On voulait un truc très abouti, très complet, très pop.
Pour Hinterland aussi, vous réalisé une grosse partie à deux, à la maison. Ca a changé votre façon de jouer ?
Oui, pour cet album notre façon de faire de la musique était complètement différente. Koen travaillait tout le temps pour ses mendats de production et moi je restais à la maison et j’avais le temps de chercher, d’essayer de nouvelles choses. J’ai fait beaucoup de chansons à la guitare. Mais en fait, je ne sais pas jouer de la guitare ! J’ai donc pris pas mal de temps à faire des essais avec un instrument que je ne maitrise pas du tout. J’ai aussi composé sur mon ordinateur.
Ce qui changeait le plus par rapport à ce que j’avais fait jusque là, c’est que j'ai composé en me basant sur un rythme, un beat ou sur un truc que Koen avait joué. C'est différent de commencer en acoustique. Et puis une fois que j’avais fait les chansons dans l'ordinateur - avec des sons très génériques que Koen déteste – il reprenait et recommençait tout depuis le début. J’ai du apprendre à jouer mes propres morceaux.
C’était pas frustrant ?
Non, c’était le but !
Hinterland semble plus abouti et moins fou que tes albums précédents. Tu te sens vraiment plus apaisée ?
A mon avis, les gens pensent que Hinterland est moins « fou » parce qu’il y a un « flow » dedans. Avant on faisait toujours des chansons qui commençaient tout doux avec un crescendo et puis quand les gens commençaient un peu à bouger, on cassait tout. Parfois on faisait aussi l’inverse. Mais avec le temps, c’est devenu un système. Donc on avait envie de changer, d’installer un groove et de le garder jusqu’à la fin.
Du coup on est moins surpris aussi.
Oui… Mais je trouve cela bizarre qu’on puisse dire que Hinterland est « plus abouti » parce que l’album précédent (le 3e, ndlr), justement, était très abouti - super, hyper abouti ! Pour Hinterland on est retourné à l’immédiat. Par exemple pour les prises de chant : dans album précédent on en a parfois fait jusqu’à 60.
60 ??
Ben oui, t’essaies plein de micros, tu fais des tests, ça devait être parfait. Mais cette fois-ci on ne voulait plus ça. On préférait garder l’émotion du début. C’est presque toujours des premières prises. Même s’il y a des fautes.
…Qu’on ne remarque pas.
Oui. Et la musique est plus « vivante » comme ça.
Tu es souvent comparée à Kate Bush, Tori Amos ou même Camille. Qu’est ce que ça te fait ?
Les gens aiment bien faire des comparaisons pour donner une direction. Après, bon...je suis vraiment fan de Kate Bush, c’est quelqu’un qui a quelque chose de très particulier, de très artistique. Mais John Robert Wyatt et Marc Cohn aussi et ce sont de grandes influences sauf que personne ne le remarque parce que ce sont des mecs. Non mais vraiment, toutes les filles sont direct cataloguées comme des références à Björk ou PJ Harvey et une fille au piano c’est toujours Tori Amos - même si au fond, ça n’a rien à voir. Après, si on considère Kate Bush comme quelqu’un de très talentueux et que je suis talentueuse aussi, c’est cool !
Beaucoup de gens te connaissent surtout grâce à ta reprise de « Il est 5 heures…Paris s’éveille » de Dutronc. Comment ça se fait?
On allait jouer aux Francofolies. Dans le temps il n'y avait pas encore beaucoup de groupes qui chantaient en anglais donc on nous a demandé si on pouvait faire un truc en français. Et on a commencé à faire quelques reprises pour s’exercer et s’amuser et « Paris s’éveille » était la meilleur. En jouant en live ça a pris une forme très folle. C’était la période des White Stripes et pour rigoler on a s'est inspiré d'eux. C'est vrai que ça a bien réussi!
Est-ce que le fait d’être née dans un petit pays bilingue comme la Belgique (un peu comme la Suisse, tsé) a une influence sur ta musique ?
Je pense, oui. C’est tellement petit qu’on est inondés par les influences de l’étranger. En suisse-romande, il y a encore une énorme influence de la France mais vous connaissez aussi tous les trucs anglais. Bon en France, ils connaissent aussi tous ces trucs. Mais c'est récent. Avant la France restait quand même plus centrée sur elle même...et faisait tout en français. En Belgique, par contre, on a jamais vu les films Walt Disney doublés comme en France. Et puis, bien sûr, mes parents écoutaient les grands classiques de la chansons française parce que c’était très à la mode et aussi parce que c’était l’âge d’or. Mais au final, on prend nos influences un peu de partout.
En tout cas la Suisse et la Belgique se ressemble beaucoup.
Oui je ressens ça quand je viens ici.
Tu te sens carrément chez toi ?
Je sais pas. Il y a quand même beaucoup de montagnes ! Sinon j’ai l’impression que les gens ici sont un peu plus "down to earth" que les français.
Mouais. Ils sont surtout plus coincés.
Je ne sais pas mais et tout cas, quand je fais des interviews en Suisse, les questions ressemblent beaucoup à celles que l’on me pose en Belgique. Quand je suis en France, par contre, on me pose une énorme question avec la réponse de ce que eux ils pensent déjà inclue dedans. Mais bon, j’adore la France, hein !
Puisqu’on parle de la Suisse et de la Belgique. Lequel est le pays du chocolat ?
La Belgique !
Mauvaise réponse.
Si !
Sauf que Neuhaus, le type qui aurait le premier amené le chocolat en Belgique, est originaire de Suisse…
Oui mais bon, il y a plein d’exemples de gens qui ont commencé un truc et ça veut pas dire qu’ils l’ont fait correctement ! (rires) Je vais me faire taper ! Non mais, sérieusement, y a de la place pour tout le monde.
Mais le chocolat, c’est sacré.
Quel que soit le domaine, quand les gens font quelque chose avec de la passion, c’est toujours bien ! Après, s’il y a des différences, tant mieux. En en matière de chocoalt, il y a des meilleures marques belges et de sûrement de très bonnes marques suisses. Il y a aussi des trucs très inférieurs en Belgique et des trucs très inférieurs en Suisse.
Tant que c’est supérieur à Cadbury…
Bien sûr, puisqu’on fait du vrai chocolat. C’est ça le plus important !
Après, les bonnes marques de chez nous modifient quand même leurs recettes pour plaire au pays vers lequel elles exportent leurs produits.
Oui et c’est très con.
Tu adores le chocolat mais est-ce que tu aimes aussi le thé ?
Oui ! Surtout le thé aux herbes et le Yogi aussi. Sinon, en ce moment je bois beaucoup de thym et de sauge parce que c’est bon pour la voix.
Raconte nous ton pire concert.
Facile ! C’est la fois où j’ai pleuré. Je ne sais pas ce qui c’est passé - sûrement la fatigue, le stress, l’accumulation de plein de choses… un véritable "break down" - mais j’essayais quand même de continuer et c’était vraiment horrible. Et impressionnant aussi. Pour moi et aussi pour les spectateurs. Je veux pas que ça revienne.
Sinon on a déjà eut des concerts qui étaient musicalement très mauvais. Ca arrive surtout quand on est sous pression, quand on a l’impression qu’on doit impressionner.
Jamais eut de problèmes techniques ?
Si, bien sûr, ça arrive très souvent ! Mais on essaie de faire le mieux avec ce qu’on a.
Si tu étais une femme célèbre ?
En fait, j’aimerais pas être quelqu’un de différent, mais j’aimerais bien avoir une carrière comme par exemple celle de Björk par exemple. Elle fait quelque chose de très particulier mais elle a quand même fait des tubes. C’est ça mon rêve : avoir les moyens pour continuer et mûrir sans limites.
Mais nous on aime bien les petits concerts dans les petites salles.
Je comprends. Mais de temps en temps c’est aussi bien de pouvoir faire des salles plus grandes, pour l’argent.
Tu es très pragmatique.
Oui mais tu as besoin de l’argent ! Et puis tu aimerais aussi que ta musique touche le plus grand nombre de gens possibles. Sauf que j’ai pas envie de laisser de côté la qualité, de faire des conneries juste pour atteindre plus de gens. J’aimerais bien faire un gros tube avec ma musique à moi !
Sing Song Sally
Buffalo
Where Did It Come From?