L’évaluation des enseignants par leur chef d’établissement est, ce mois-ci, à l’actualité…
La note d’un professeur est sur 100. Elle se décompose en:
- une note pédagogique, sur 60, qui est ré-évaluée à chaque inspection
- une note administrative, sur 40, donnée chaque année par le chef d’établissement.
La suite est plus complexe… en effet, il existe des « grilles nationales des notes administratives » qui varient en fonction de l’échelle de rémunération de l’enseignant, ( et du fait qu’il est dans la classe normale ou une hors-classe, qu’il est stagiaire ou contractuel…etc )
En plus de cette grille des notes moyennes par grade et par échelon, le chef d’établissement a un intervalle de notation ( très resserré ) qu’il peut utiliser sans rapport, et si il choisit de sortir de cet intervalle , ( et bien sûr à l’intérieur de ce qu’il peut faire de par la grille … ! ), il doit se justifier par un rapport transmis au rectorat et à la commission technique paritaire … Bref, assujetti à tout ce processus, le chef d’établissement attribue une note à chaque enseignant
Les syndicats des enseignants, en majorité demandent « , l’avancement de tous à la vitesse la plus élevée (grand choix) » et revendiquent un avancement au même rythme pour tous avec accès à l’indice maximum en fin de carrière.
Le chef d’établissement que je suis, s’interroge sur la lourdeur de cette tache, pour des effets si minimes, et de si peu d’intérêt… Ce n’est pour lui, d’aucune aide pour conduire sa propre gestion des ressources humaines …!
Il m’arrive, régulièrement, de « forcer » le système en demandant un dépassement pour des enseignants que je ne peux valoriser comme je le souhaiterais …. Et je n’ai, à ma disposition, d’aucune heure ( HSE ) pour faire rémunérer un investissement particulier …
Il nous arrive d’en sourire, de proposer ce même système pour l’évaluation des élèves … ! On économiserait les conseils de classe … Peut-être même les examens …
A la suite de cette question, nous pourrions entrainer notre réflexion, sur toute la gestion des ressources humaines de l’Education nationale …
- Je pense à ces personnes qui sont envoyées par le rectorat pour effectuer un remplacement, et qui n’ont jamais enseigné, qui ne sont jamais ( hors comme élève ) entré dans une classe .. !
- un jeune professeur TZR, remarque vite que chacun est interchangeable. « Le mérite, la compétence? Des gros mots. Toute l’organisation repose sur l’idée qu’il faut interdire l’arbitraire dans les décisions d’affectation, en ne prenant en compte que des données objectives calculées selon des règles collectives. » Une armada de Numen répartis par des logiciels. » Romain G., agrégé et major du Capes en sciences économiques et sociales (SES).
- « Claire Mazeron, professeure de géographie, auteur d’Autopsie du Mammouth (éditions Jean-Claude Gawsewitch). La jeune femme corrige les copies du Capes et fait passer les oraux aux candidats. Mais depuis neuf mois, elle attend toujours d’être payée pour ce travail. Environ 2300 euros, auxquels il convient d’ajouter le remboursement des frais avancés (trois semaines d’hôtel à Châlons-en-Champagne, plus les repas et les trajets) soit environ 2 500 euros. Au total, l’Etat lui doit donc quelque 5000 euros. « Sur les 80 personnes de mon jury, les deux tiers n’ont pas encore été payées, y compris le président! raconte-t-elle. Lorsque l’on réussit à joindre quelqu’un pour se renseigner, on nous répond que cela a dû « rester dans les tuyaux ». Nous avons décidé que, si la situation n’était pas clarifiée au 31 mars, le jury dans son ensemble démissionnerait. » »
- Bien souvent, ce sera le hasard, ou la contrainte, qui expliquera que des collégiens puissent avoir un prof principal, un enseignant stagiaire… Des élèves de Terminale avec un « enseignant dépressif, épuisé, qui finira par être déclaré inapte au travail et qu’on laissera sur le bas-côté de la vie active, payé mais en jachère. » …etc la liste pourrait être longue … !
- Comment expliquer à des parents que cette année, les « heures de soutien » seront à 35 élèves … ? ( ndt: il s’agit de l’accompagnement personnalisé )
- « Pour la première fois de ma carrière, je me demande comment je vais réussir à établir les emplois du temps de l’an prochain, confie Stéphane du Crest, proviseur du lycée Corot de Savigny-sur-Orge, l’un des plus grands de France, avec 2700 élèves et 270 professeurs. »
- Avec, chaque année, plus d’élèves, j’ai moins d’adultes pour encadrer les élèves… Je dois prévoir d’augmenter les heures supplémentaires à des personnels qui les refusent, et à qui on ne peut imposer plus d’une seule heure supplémentaire … !
- « La réforme de la formation des maîtres – la mastérisation – a laissé sur le carreau de nombreux jeunes. Martin, stagiaire de 22 ans (voir L’Express du 22 septembre 2010) affecté dans une école en ZEP de Seine-Saint-Denis, a finalement abandonné. Il ne sera pas prof, tant pis. »
Je pourrais parler ( une autre fois…) du « projet d’établissement » qui dans un tel cadre perd de sa pertinence, et qui d’ailleurs n’est invoqué que dans le cadre d’une obligation administrative …
« Comme le confie une jeune enseignante: « Ce système me fait penser à l’Union soviétique avant sa chute. Il rend tout le monde malheureux, mais personne ne veut le changer, chacun redoutant que le mouvement aboutisse au pire et non au meilleur. »
Le citations sont relevées dans l’Express : Education nationale: « La gestion des RH? Elle n’existe pas » Par Laurence Debril, publié le 23/03/2011