Ce texte de Jérôme Lurie est arrivé dans ma boite avec le sous titre « Comme une envie de hurler ! » .
Si vous regardez la télévision en ce moment, vous êtes peut-être tombés sur un spot publicitaire en musique et sans parole, tout en suggestibilité :
Ce spot commence par des images de rugby d'un match que l'on devine dantesque dans des conditions atmosphériques dignes des tranchées d'octobre 1917. On se dit alors qu'il s'agit d'une marque d'articles de sport qui s'appuie sur les valeurs guerrières et l'esprit d'équipe du ballon ovale pour valoriser son image. Il n'en est rien, car on bascule sans transition sur une autre scène, l'émetteur du message n'est toujours pas identifié...
Scène suivante, on reconnait un chef d'entreprise debout au téléphone l'air préoccupé, au milieu de ses employés au travail, dans l'attente d'une nouvelle. Peut-être attend-il la confirmation d'une non-délocalisation alors que, lors des dernières négociations, les employés ont accepté de renoncer à deux mois de salaire, de donner un rein et de faire travailler leurs enfants gratuitement. Ça y est la bonne nouvelle est arrivée, le boss exulte (le réparateur de la machine à café viendra aujourd'hui ?). S'ensuivent scènes de liesses en travelling et gros plans sur sourires de dentifrice. Même si je suis troublé, je me risque à penser qu'il s'agit alors d'un spot pour un syndicat, l'émetteur du message n'est toujours pas identifié...
Plan large en contre-plongé sur une femme qui ouvre son courrier en nuisette sur le trottoir devant chez elle. Son mari qui est avec les enfants à la maison regarde par la fenêtre, il la voit qui laisse tomber l'enveloppe ouverte. Il descend la prendre dans les bras, elle pleure. Ça y est, cette fois c'est sûr, c'est une campagne pour la prévention du cancer du sein pourtant, l'émetteur du message n'est toujours pas identifié...
Toujours sans transition, des scènes au ralenti montrent des pompiers qui reviennent du feu l'air exténué, noirs de suie. En arrière plan, on croit reconnaître des scènes apocalyptiques comme celles de Christchurch ou bien Fukushima juste après le séisme, des gens dehors l'air hagard entourés dans leur couverture de survie contemplent un paysage de désolation. A ce moment là, je dois avouer que je commence à être perdu, je ne connais toujours pas l'émetteur du message. Je me risque à penser qu'il s'agit d'une campagne d'appel aux dons d'une organisation humanitaire, mais je doute de plus en plus...
La dernière scène est édifiante, on voit une cohorte de manifestants faisant front face à la police, et là, comment ne pas identifier l'allusion à la révolution de jasmin qui est en train de secouer la plupart des pays du Maghreb ou bien les manifestations des peuples européens tels les grecs, les irlandais ou les portugais contre les plans de récessions imposés par le FMI. Ça y est, là j'en suis sûr, nous allons voir apparaître le logo d'un parti politique qui rentre en campagne.
Tout d'un coup, plan fixe sur une page blanche... c'est une banque française qui affiche son logo dichromatique en rouge et noir avec cette phrase : « développons ensemble l'esprit d'équipe ».
Je suis allé vomir aux toilettes.
Comment ne pas trouver ce spot indécent ?! Cette banque tente de profiter des évènements actuels pour se faire une campagne de pub et de s’approprier une partie des émotions ou de la peur que tous ces faits de sociétés engendrent.
Sans compter que certains des faits décrits découlent directement des égarements de gestion de cette même officine et de ses consœurs.
Après avoir pollué l'économie réelle avec l'achat d'actifs toxiques, après le scandale KERVIEL, que cette banque se servent des évènements tragiques pour des arguments publicitaires me révulse.
Que le CSA ne se manifeste pas m'horrifie également, car cette banque par son impudeur est en train de placer le curseur au niveau de la pornographie intellectuelle.
J. LURIE