The Strokes
Angles
RCA Records
États-Unis
Note : 7/10
par Williams Fonseca-Baeta
Les dieux du cool attitude et de la nonchalance n’ont pas eu la vie facile ces dernières années. Les Strokes se sont disputés à cinq un trône à place unique; trop petit pour soutenir autant d’égos. On ne peut leur en vouloir, après trois albums et quatre projets solos, les membres du quintette new-yorkais ont acquis plus d’expérience et de notoriété que tout autre groupe apparu dans la dernière décennie. Leur nouvel album, Angles, le premier depuis First Impressions of Earth en 2006, reflète la lutte interne des Strokes. Le disque ne prend aucune direction précise et se perd dans les déboires d’un labyrinthe incongru sans angle droit.
Il a fallu plus de deux ans de production pour que les Strokes achèvent ce quatrième opus. Difficile de dire si cette période a davantage servi au peaufinage du disque qu’au schisme musical divisant le groupe. Le chanteur, Julian Casablancas, met un terme à l’enregistrement en 2009 pour travailler sur un disque solo, Phrazes for the Young. Ce n’est qu’en 2010 que la troupe new-yorkaise décide de reprendre la production d’Angles, mais cette fois-ci sans son chanteur. L’ajout de la voix de Julian Casablancas s’est fait plus tard et à distance afin d’éviter la discorde entre les membres.
Sur Angles le son des Strokes laisse place à l’individualité de ses cinq membres. Seuls les morceaux Under Cover of Darkness et Metabolism reprennent là où le disque précédent s’était terminé. La pièce You’re So Right ressemble à un préenregistrement de River Of Brakelights, une chanson de l’album solo de Julian Casablancas, tandis que Call Me Back utilise l’atmosphère exotique exploitée dans le projet solo du batteur Fabrizio Moretti. Les guitaristes Nick Valensi et Albert Hammond Jr ont chargé tous les morceaux de solos et de suites d’accords s’inspirant des années ’70 et ’80. Cette touche rappelle les envolées électriques de groupes comme Thin Lizzy et Motörhead.
Mis à part son éclectisme, le dernier des Strokes offre des moments forts. À l’image du dernier disque des Yeah Yeah Yeahs, It’s Blitz, le groupe a adopté pour certains morceaux, un son tendant vers la vague musicale des années ’80. Two Kinds Of Happiness et Machu Picchu en sont les meilleures réussites. Le premier, Two Kinds, fera secouer les têtes des automobilistes cet été. La pièce débute sur un clin d’œil inspiré d’un new-wave typique des Cure et s’éclate au refrain sur une avalanche instrumentale. L’énigmatique Machu Picchu mélange sans vergogne reggae, rock et new wave sur des accords accrocheurs. C’est à se demander si le groupe n’aurait pas gagné à construire davantage autour de ces deux morceaux.
Le groupe projette déjà de lancer un cinquième disque d’ici la fin de la prochaine année. Le projet se concrétiserait de manière plus démocratique entre les membres, mais qu’en sera-t-il vraiment? À forces égales, les Strokes manquent de cohésion. Si la troupe désire poursuivre dans la même veine qu’à ses débuts, elle devra choisir une direction au détriment de certains de ses membres. Dans le cas contraire, le trône des Strokes finira par s’effondrer sous le poids de la différence.