Dans cette adaptation d’un roman de Michael Connelly, Matthew McConaughey est Michael Haller, avocat de la défense – carnassier et impitoyable- qui plaide les cas les plus difficiles: meurtres, viols, et compagnie. Brillant, audacieux… jusqu’au jour où un richissime fils à maman (Ryan Philippe), accusé du passage à tabac d’une prostituée, le choisit pour le représenter. Avec ce deuxième film, Brad Furman (The Take) plante d’emblée le décor : soleil californien, bande son soul et hip hop, magouilles judiciaires, caméra nerveuse. Soit une série B dans toute sa splendeur, au design très masculin, qui capte efficacement la noirceur du bouquin. Fouille psychologique de la figure de l’avocat, La Défense Lincoln (titre clin d’oeil à la voiture du monsieur) tape là où ça fait mal : corruption à tous les étages de la machine judiciaire, manipulations internes et dilemmes moraux- le film dresse un tableau peu reluisant d’un univers dont la droiture est mise à l’épreuve. Questionnant l’éthique de la profession, le thriller pose de vraies bonnes questions sur la table : jusqu’où le devoir professionnel prend-t-il le pas sur la morale ? Comment aborder les notions de bien et de mal en tant qu’avocat ? L’anti héros incarne ces ambigüités et complexités, cette difficulté à mêler travail et humanité, conscience morale versus conscience professionnelle. Derrière la carrure massive qu’offre l’acteur au personnage (que l’on se réjouit de voir ailleurs que dans le genre romantico-comique), le film dépasse l’illustration canonique d’une figure de loi, et insuffle une vraie âme à l’homme : avocat, certes ; mais aussi ex-époux, père distrait, homme à la vie que l’on devine sacrifiée, abîmée, par des plaidoiries aussi motivantes que dérangeantes, où sont laissés de côté jugements et sentiments. En cela, le film- malgré des tics télévisuels qui l’empêchent grandement de dépasser son statut de divertissement- parvient plutôt bien à saisir la troublante réalité d’un métier où se brisent, au cœur des rouages judiciaires et d’un monde sans pitié, l’image de l’avocat épris d’idéaux. Alcool, argent sale, manipulation : un cocktail honnête pour des protagonistes malhonnêtes, qui transpire de la pellicule pour venir chatouiller les consciences.
Sortie France: 25 mai 2011.