Chalut les humains,
Je dois avouer que j’aime bien les boxeurs.
Non, pas ces pitoyables représentants baveux de l’espèce canine, mais ces sportifs qui montent sur le ring pour se refiler des uppercuts au menton, des directs du droit et des crochets du gauche. Ce sont les rares humains à être aussi doués pour le combat rapproché que nous autres félins, qui aimons nous filer des peignées pour un territoire, une femelle ou juste pour faire un peu d’exercice…
J’aime bien aussi les boxeurs au cinéma, parce que ça donne des films souvent intéressants. Des classiques hollywoodiens, déjà, comme Nous avons gagné ce soir, L’homme tranquille ou Gentleman Jim ; des biographies comme celles de Rocky Graziano (Marqué par la haine), Mohammed Ali (Ali), Jake LaMotta (Raging bull) ; des mélodrames (Million Dollar baby) ; des comédies (Ca va cogner) ; des polars (La Nuit du défi) ou des films socio-psychologiques (le premier Rocky, The Boxer).
A chaque fois, il est passionnant de voir des personnages surmonter leur souffrance physique et puiser dans leurs ressources morales pour vaincre leur adversaire, ou faire des perdants magnifiques ayant réussi à dépasser leurs limites.
Et chaque fois, je vibre pour les héros lors d’un combat final forcément âpre et disputé.
Fighter, le nouveau film de David O. Russell, ne pouvait donc que me plaire, vu qu’il cumule toutes les qualités des grands films sur la boxe précités.
Déjà, il s’agit d’une vraie success-story, celle des demi-frères Micky Ward et Dick Eklund, qui réussirent, le premier sur le ring et le second comme entraîneur/conseiller technique, à apporter à leur famille la ceinture de champion du Monde des poids welter.
Et, chose intéressante à l’écran, cette victoire s’est construite dans la douleur, sur fond de psychodrame familial.
Micky Ward a dû composer avec une structure familiale clanique un peu trop envahissante, notamment une mère dirigiste et étouffante faisant office de manager et sept soeurs pas commodes pour l’assister. Sans compter son entraîneur de frère, ancien boxeur professionnel ayant eu sa petite heure de gloire lors d’un combat contre Sugar Ray Leonard mais n’ayant jamais été en mesure de gagner un titre, et qui, depuis l’arrêt de sa carrière de boxeur, avait sombré dans la drogue et passait beaucoup de temps à fumer du crack avec ses potes zonards.
Pas facile, dans ces conditions, de s’entraîner sérieusement pour un championnat du monde. Les combats auxquels il était inscrits par sa mère s’avéraient foireux la plupart du temps, comme celui où il avait dû affronter un type issu de la catégorie de poids supérieure – tout en muscles – et il perdait un temps fou à attendre son frangin, parti planer dans son coin…
Il s’en est sorti grâce à l’aide de son père, de son ami O’Keefe et de sa fiancée Charlene, qui lui ont trouvé un manager plus sérieux et un environnement plus serein. Il a ainsi pu reprendre sa marche en avant vers la victoire.
Pendant ce temps-là, Eklund a purgé une peine de prison et suivi une cure de désintoxication. Il est sorti, clean et affûté, juste à temps pour entraîner et conseiller son frère en vue du match pour le titre mondial. Avec le succès que l’on connaît…
David O. Russell commence par nous dresser le portrait de deux loosers. Au début du film, Eklund n’est qu’un fanfaron qui se repose sur un vieux moment de gloire et fait croire à son grand retour dans le monde de la boxe alors qu’il n’est clairement plus en état de faire grand-chose. Et Ward est sur le point de renoncer à ses rêves de gloire sportive, prêt à jeter l’éponge et à se construire une nouvelle vie plus « normale », avec femme et enfants.
Puis, il montre l’évolution des rapports de force au sein du clan familial, bouleversés par l’irruption de la nouvelle fiancée de Ward, Charlene, qui n’hésite pas à tenir tête à la horde de sœurs castratrices. Ceci donne beaucoup de force au récit, d’autant que les personnages sont incarnés par d’excellents acteurs : Mark Wahlberg incarne de façon convaincante Micky Ward et trouve là l’un de ses plus beaux rôles depuis The Yards, autre histoire de famille complexe et tourmentée, Amy Adams est également très bien dans le rôle de sa compagne, barmaid au caractère bien trempé. Quant à Melissa Leo, qui joue la mère excentrique de Ward, et Christian Bale, qui incarne Eklund, leurs performances ont été récompensées par les oscars des meilleurs seconds rôles masculin et féminin en février dernier.
Enfin, il boucle le film de la plus belle des façons, avec un combat final très bien rendu, qui électrise la salle de cinéma autant que les spectateurs autour du ring.
On a beau connaître le résultat final, on se retrouve happé par le suspense autour de l’issue du combat, le souffle coupé à chaque coup encaissé par le héros, craignant pour sa santé…
Et le KO final nous met nous aussi au tapis, lessivés et heureux.
Bien sûr, il se trouvera toujours des esprits chat-grins pour dire que David O. Russell se contente de recycler de vieilles recettes du genre, que son film est très « hollywoodien ». Peut-être, mais en même temps, il s’agit d’une histoire vraie, il ne va pas se compliquer la vie en rajoutant des tas de trucs inutiles, non plus. Et si les vieilles recettes fonctionnent toujours, il serait idiot de tenter quelque chose de différent et de se planter totalement, non ?
Ben moi, j’ai aimé cette belle histoire de réussite sportive, cette relation fraternelle tumultueuse et cette ambiance particulière, ce petit je ne sais quoi que l’on retrouve dans les meilleures productions en provenance du pays de l’Oncle Sam…
Bon, faut que je vous laisse, il faut que j’aille filer quelques coups de pattes sur la truffe du chien du voisin, un boxer, vous vous doutez bien…
Plein de ronrons,
Scaramouche
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Fighter
The Fighter
Réalisateur : David O. Russell
Avec : Mark Wahlberg, Christian Bale, Melissa Leo, Amy Adams, Jack McGee
Origine : Etats-Unis
Genre : coup de poing
Durée : 1h53
Date de sortie France : 09/03/2011
Note pour ce film : ●●●●●○
contrepoint critique chez : Rob Gordon
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