En DVD : Je ne vais pas être très original pour cette chronique. Je fais partie des millions de spectateurs qui ont été emportés et bouleversés par Benda Bilili! Applaudi à Cannes, encensé par la critique et plébiscité par le public, ce documentaire a su déjouer les pièges que tendait le sujet.
Suivre pendant plusieurs années un groupe de musiciens congolais handicapés, monté sur des fauteuils roulants au look de Harley Davidson, des papys funky tentant d'échapper à la misère, idoles de leurs congénères et d'une marmaille livrée à elle-même (les chegué en lingala) dans les rues de Kinshasa, suivre cet orchestre improbable mais talentueux donc pouvait amener les réalisateurs à laisser libre cours au misérabilisme et/ou à l'excès de bons sentiments. D'autant que l'histoire vire au conte de fée : à force de répétitions, animé par une foi sans faille, le groupe parvient à enregistrer un album avant d'enchaîner une tournée européenne et de recevoir un accueil triomphal au Festival de Cannes 2010, où le film a été présenté à La Quinzaine des réalisateurs.
Parole aux Kinois
Heureusement, Florent de la Tullaye et Renaud Barret ont eu l'intelligence de ne pas tomber dans le panneau. On sent bien que les deux hommes connaissent l'Afrique ; en tout cas, qu'ils l'ont compris pendant les cinq années de tournage (commencé en 2004). Ils ont eu le temps de se faire accepter par les zicos (quitte parfois à se faire vanner, voire menacer par d'autres "figurants"), le temps de s'imprégner des lieux et surtout, ils ont su laisser la parole à ce petit peuple des rues qui se révèle au naturel : généreux, débrouillard, roublard, combattif et parfois bagarreur, toujours prêt à tirer sur un joint ou à écluser une bonne bière, d'un optimisme qui force le respect. Avec un coeur énorme. Et, en ce qui concerne les Benda Bilili!, avec un talent que l'on voit éclore puis éclater sous nos yeux.
Alors oui, j'ai été ému, effaré par les conditions de vie dans ce pays qui est potentiellement l'un des plus riches d'Afrique, j'ai ri, j'ai kiffé la musique - cela m'a rappelé quelques belles soirées de jeunesse avec des amis qui étaient alors Zaïrois et qui mettaient le moto (feu) en dansant sur du Koffi Olomidé, du Papa Wemba ou du Wenge Musica. Revenons au documentaire : le beau sujet est servi par une mise en scène discrète mais qui ne loupe rien de ce qu'il y a à voir et qui offre même de superbes plans, très esthétiques ainsi que quelques moments de poésie pure. Un film qui fait battre autant le pied que le coeur, ça ne se manque pas. Surtout que l'édition vidéo que propose Studio 37 comporte des bonus qui permettent de prolonger la magie du film.Anderton