Le nucléaire ET la bougie

Publié le 21 mars 2011 par Unpeudetao

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Que de caricatures avons-nous du subir depuis des décennies ? En s’opposant au nucléaire, les écologistes auraient implicitement fait le choix de la bougie, du retour à une société préindustrielle. Les écologistes, partisans d’une sortie rapide du nucléaire, auraient ainsi opté pour un conservatisme bon teint où la précaution ne serait qu’un principe d’inaction mâtiné d’une petite dose de politiquement correct.

Face à ces nouveaux « réactionnaires », les thuriféraires de l’atome avaient beau jeu d’imposer une vérité, LEUR vérité. Après la catastrophe nucléaire de Tchernobyl et celle de Fukushima, cette vérité a, comme l’enceinte de confinement, volé en éclat.

Comme les chats, les lobbyistes du nucléaire retombent pourtant toujours sur leurs cinq pattes… La catastrophe nucléaire qui touche le Japon aujourd’hui et la Terre entière demain ne serait que le fruit du déchainement des éléments naturels ; ne serait pas intrinsèque à la complexité de la technologie nucléaire.

Partant de là, la France ne serait pas concernée par cette catastrophe et ne serait pas exposée à l’hypothèse d’une telle catastrophe. Mieux, le réacteur développé par la France serait plus sûr, plus fiable et l’opérateur historique aurait à cœur de défendre une transparence qui serait l’identité même d’EDF.

Las… nos centrales vieillissantes alliées à la privatisation larvée du secteur nucléaire nous amènent à entrevoir des risques qu’il est inutile de cacher sous le tapis radioactif. La maintenance des réacteurs coûte de plus en plus cher. Parallèlement, la quête d’économie de bouts de chandelle amène les gestionnaires des centrales à recourir à des intervenants extérieurs, intérimaires et soutiers du nucléaire, exploitables et irradiables à souhait.

Nul n’est donc à l’abri à l’avenir d’une catastrophe nucléaire, même en France. Les raisons de ce risque ne sont pas seulement sismiques mais systémiques, inhérentes à la technologie nucléaire. Sa complexité, sa lourdeur et son coût sont inadaptés à notre monde.

Vieillissants, les réacteurs vont entraîner des coûts de maintenance exponentiels. Dans le même temps, il est à craindre que la libéralisation du secteur de l’énergie se traduise par une volonté de diminuer le coût de production afin de satisfaire l’avidité de l’oligarchie éco-prédatrice. Cette mécanique bien huilée est intrinsèquement dangereuse. Plus une technologie est complexe, plus elle est vulnérable, moins elle est maîtrisable quel que soit les illusions techniciennes des lobbyistes du nucléaire passés en politique. Dans une société technicienne, les interactions sont nombreuses, la complexité grandissante engendrant des effondrements systémiques.

Or, comme nous pouvons le constater aujourd’hui au Japon, le fait d’avoir opté pour une certaine forme d’unilatéralisme énergétique nous place dans une dépendance extrême au nucléaire. En cas d’accidents majeurs que seuls des technocrates pétris d’idéologie refusent même d’envisager, la France se retrouverait placée dans une situation dramatique.

Dramatique sur le plan écologique et sanitaire, mais également sur le plan de la production d’électricité. En étant pieds et mains liés au nucléaire, la France prend le risque, en cas de catastrophe, d’un retour à la bougie, faute d’alternatives aptes à suppléer immédiatement à ce nucléaire.

Pour éviter la menace nucléaire, il nous faut préparer l’avenir. En décidant immédiatement de sortir du nucléaire, nous nous mettons en marche vers un autre avenir énergétique où l’unilatéralisme et le dogmatisme sectaire ne serait plus la clef de voute d’une politique qui mélange, depuis 40 ans, progrès technique et progrès humain.

Le meilleur moyen d’éviter la bougie est de sortir du nucléaire. Une sortie programmée, assumée et gérée politiquement à court, moyen et long terme. A défaut, nous prenons le risque d’une catastrophe nucléaire et par la suite un chaos qui nous ramènerait immanquablement à la bougie.

Stéphen Kerckhove, délégué général d’Agir pour l’Environnement

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