Vous avez une petite envie de croissant croustillant, encore tout chaud ; vous rêvez d'engloutir un petit chausson aux pommes, de dévorer une belle part de flan nature... Vous entrez dans la première boulangerie qui se présente à vous, mais oui !
Vous voulez tester la nouvelle Clio... non j'oubliais que vous, ce sont les grandes bagnoles qui vous intéressent, mais attention à la consommation, en ce moment le carburant coûte cher ! et Khadafi ne semble pas avoir dit son dernier mot. Le pétrole, ma parole, ce n'est pas une babiole dans les relations internationales ! Vous allez donc faire le tour des garages, surtout que vous hésitez : marque française, allemande, japonaise ? Ah ! le Japon. Ces catastrophes naturelles me laissent complètement démunie, je n'ai plus de mots. Quand la nature vous flanque une giffle, vous êtes sonné, vous n'avez même pas le temps, ni la force de crier, vous mettez simplement la main à votre joue douloureuse.
Et quand vous voulez rencontrer un auteur, LES auteurs qui ont écrit à l'encre indélébile une belle page de votre vie de lecteur ou de lectrice, vous allez où ? Quand vous voulez faire d'une pierre dix, vingt, trente coups, quand vous désirez les voir tous ou les apercevoir, ces auteurs avec qui vous avez fait connaissance dans l'intimité de la lecture, ces géniteurs des personnages qui vous ont séduit, avec qui vous avez eu un flirt ou une brouille, vous allez où, où, où ?... Au village, mais bien sûr ! ... Hein ? Quel village ? Mais le village des auteurs, voyons, le salon du livre !
Tous les villages n'ont pas la même importance, qu'on parle en termes de population ou de superficie. Et l'un des plus gros villages est sans aucun doute le salon du livre de Paris. Là vous avez 90% de chance de rencontrer toutes les générations d'écrivains : les anciens ou les vétérans, les jeunes, les couronnés, les moins connus. Mais la star, c'est tout de même le livre. C'est lui qui, prenant d'une main les auteurs et de l'autre les lecteurs, les unit par les liens sacrés de l'amour de la lecture ! Ah quel beau mariage ! Et surtout sans complexes ni règles, aimez des hommes, aimez des femmes, des jeunes, des vieux, soyez polygame, polyandre, Sarkozy ne vous fera pas un procès pour cela, il ne vous refusera pas la nationalité française, si vous la lui demandez.
Au village, il faut juste avoir son alliance pour célébrer le mariage avec l'auteur de son choix : un des livres de l'auteur... que vous avez lu ou allez lire, il va vous être dédicacé avec beaucoup de générosité.
Virginie Mouanda, Liss, Jorus Mabiala, Jean-Aimé Dibakana, des plumes du Congo-Brazza.
Quand je suis arrivée, ce vendredi 19, porte de Versailles, je ne me suis même pas procurée de programme, je voulais d'abord aller au gré des allées, me laisser porter par la marée des lecteurs qui me portait de-ci de-là, je voulais humer tous ces livres, les regarder, les convoiter, les effleurer, les feuilleter...
Après cette baignade rafraîchissante, il fallait désormais choisir les îles où accoster. Choix pas cornélien du tout. J'ai foncé vers le panneau vert : Auteurs du Bassin du Congo. Aussitôt arrivée, j'aperçois un vétéran : Henri Lopes. Je m'approche, ne résistant pas à mes pulsions : quelques mots échangés, une petite photo souvenir, accordée avec grâce, mais mon portable n'étant pas de bonne humeur, je ne puis vous montrer la photo de notre mariage. Pendant ce temps, Jean-Noël Schifano anime une conférence avec plusieurs des auteurs publiés chez Gallimard.
Obambé Gakosso, le sac bourré de livres en bandoulière, et Liss, la bouche en mouvement, car je donne des recommandations à mon photographe de fils mais il est un peu trop court par rapport à nous)
Puis j'aperçois un lecteur qui se distingue des autres par sa belle tenue africaine, je le reconnaîtrais entre mille : "coucou Obambé !", "coucou Liss !" On a à peine le temps de se faire la bise que le voilà qui fonce parce qu'il a aperçu le doyen Dongala. Moi, je ne l'ai pas vu, je ne le vois pas, mais ça me laisse aussi le temps de foncer vers la Librairie du Sud.
Sur le chemin, je passe par le stand des éditions Actes Sud. Ouah ! la file devant Laurent Gaudé ! J'aurais bien aimé faire la queue moi aussi, mais je risque d'attendre longtemps, longtemps avant que ce ne soit mon tour, et je n'ai pas beaucoup de temps. A quelques sièges de lui, celui de Dongala : vide. Décidément, je ne vais pas avoir la chance de lui faire ma révérence aujourd'hui.
Mboka-Kiese et Liss.
J'arrive au stand Librairie du Sud, je tombe sur un panel de plumes du Congo. Jean-Aimé Dibakana, Jorus Mabiala, Virginie Mouanda, conteuse que vous pouvez découvrir ici : http://vmouanda.free.fr/Et dans le fond, j'aperçois Alain Mabanckou, en train d'être interviewé par je ne sais quelle radio. Eh bien, j'ai de la chance ! Je vais patienter. Quand je me retourne, la haute stature de Dany Laferrière colonise mon regard. Je suis hypnotisée, mais j'ai le temps de me faire la réflexion que, quand on aperçoit Mabanckou, cela veut dire que Dany Laferrière n'est pas loin, et inversement. Alain a enfin terminé, je vole à lui, je veux me présenter mais il me coupe d'un "Liss !", j'en reste tout baba.
Alain Mabanckou et Liss
Tiens, tiens, qui voilà ? Mboka-Kiese ! lecteur, blogueur, frère de Mawawa Mawâ-Kiese, qui tient les éditions Paari. Discussion animée sur la littérature. Lui ne jure que par la littérature russe. "Tu sais, les Russes ont su mêler l'histoire, la philosophie, la littérature avec beaucoup de subtilité, il faut suivre l'exemple des Russes !" assène-t-il, ce qui me rappelle un passage d'Al Capone le Malien.
Et puis... ce chapeau, là-bas, il ne vous dit rien ? L'homme... ou l'écrivain au chapeau... oui, vous avez bien deviné : Eugène Ebodé. Je ne l'ai pas encore lu, mais j'avance sans hésitation, ce sera "ce soir ou jamais". Il me parle de Madame l'Afrique. Allez hop ! dans mon panier, avec une dédicace sculptée, je vous assure !
Liss et Eugène Ebodé, au milieu un futur grand lecteur (enfin j'espère, pour l'instant c'est la bagarre, est-ce que je lui mets trop la pression ?)
Oh ! là-bas... le maître, Boniface Mongo Mboussa ! Un désir d'indocilité veut s'emparer de mes pieds qui n'apprécient pas la longue station debout, mais je leur enjoins de me mener vers le critique littéraire. Belle discussion sur la littérature, sur ce fait révoltant de ne pouvoir avoir accès à l'oeuvre romanesque d'un auteur comme Tchicaya U Tamsi, qui sera bientôt oubliée, si rien n'est fait. Et les difficultés qu'ont pu éprouver des auteurs au grand héritage comme Edouard Glissant, qui ont mené un combat toute leur vie durant, ça aussi c'est révoltant ! Nous avons été rejoints par Obambé. C'est alors que je remarque son gros sac en bandoulière, tout plein de livres. Il a fait une moisson... non, pas une moisson de crânes, n'en déplaise à Abdourahmane Waberi, que je n'ai pas vu, une moisson de dédicaces ! On parlait de Glissant, et j'aperçois Patrick Chamoiseau, comme par hasard, là-bas, devant moi.
Il y avait beaucoup de connaissances et d'amis, j'ai retroubé Bios Diallo, Rudy Malonga. Parmi les auteurs, les femmes en particulier, j'ai reconnu de loin Tanelle Boni, je cours vers elle, je mendie une photo, mais je ne sais pas, aurais-je oublié le mot magique, car je la sens réticence. Mais si Madame, je vous connais, j'ai lu Matins de couvre-feu, mais rien n'y fait, elle s'éloigne. Je reste toute tristounette.
Liss et Boniface Mongo-Mboussa.
Maman, il est quelle heure ? Maman, on rentre bientôt ? Mon fils est fatigué. Disons plutôt qu'il sent que l'heure de sa série approche... à Grand galop ! Il n'y en a que pour Gulli maintenant. Bon d'accord, d'accord, on rentre ! Pourtant je m'arrange pour faire un petit dernier tour parmi les livres, ces chers compagnons, dernières brasses pour gagner des allées moins encombrées, et paf ! le beau visage de Louis-Philippe Dalembert en plein dans ma vue ! Ah, que n'ai-je apporté mes Noires blessures ! Si j'avais su ! Il me les aurait soignées bien comme il faut. Qu'à cela ne tienne, je vais quémander une photo. Daniel Maximin, que je n'avais pas reconnu au premier abord, ne veut pas gêner et s'écarte, mais non, voyons, restez ! C'est moi qui devrais disparaître, j'ai tellement honte de ne pas encore l'avoir lu ! Mais il est si affable, si modeste, je crois profondément qu'il ne m'en veut pas.
Daniel Maximin, Liss et Louis-Philippe Dalembert (je ne l'imaginais pas aussi grand !)
Puis j'ai le temps d'échanger un petit peu avec Dalembert. Je ne cache pas ma joie d'apprendre qu'il avait, non seulement lu ma critique de son livre, mais qu'il la place parmi celles qu'il a le plus appréciées. Oui, pour l'instant, je vous l'accorde, le livre venant tout juste de sortir, il y aura bien d'autres critiques de publiées d'ici-là, n'empêche que je peux me réjouir tout de même, ne vous en déplaise ! J'en profite pour lui parler d'Afriqua Paris. J'apprends une bonne nouvelle : il quitte l'Allemagne pour se réinstaller en France, enfin momentanément. Donc Gangoueus et Penda, vous pouvez nous préparer une belle rencontre fin avril.
Gisèle Pineau, auteure entre autres de Chair Piment et Liss. Lorsque Dalembert, qui a eu la gentillesse de nous prendre, a voulu immortaliser ce moment, l'appareil s'est encore détraqué. Mon fils ne voulait apparemment pas q'un autre photographe le remplace, c'est sa photo finalement, la plus récupérable, même si elle est un peu floue.
Mon plaisir est à son paroxysme quand je vois approcher Gisèle Pineau, une grande dame ! Une dame généreuse aussi, je l'ai déjà expérimenté, mais je ne vous dirai pas à quelle occasion, eh oui, j'ai mes petits secrets ! Bon allez, fiston, je crois qu'on peut rentrer, j'ai fait ma moisson de photos.