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Avenir du nucléaire : les trois scénarios envisageables

Publié le 19 mars 2011 par Lenergiedavancer @Fil_energie
Avenir du nucléaire : les trois scénarios envisageables

Maintien de la filière nucléaire française. Réduction de la part de l’atome. Abandon progressif du nucléaire. Voici les trois scénarios envisageables pour l’avenir de l’atome. Si le drame de Fukushima a généré une importante remise en cause, les conséquences économiques et écologiques d’une sortie du nucléaire rendent cette option peu crédible.

Scénario 1 : conserver la filière nucléaire

Pour de nombreux experts, se passer du nucléaire relève, en France, de la science-fiction. Christian Ngô, physicien spécialiste de l’énergie, part d’un constat simple : l’accroissement de la population et du niveau de vie augmente sans cesse les besoins en énergie.

« Même en créant de nouvelles centrales nucléaires, on aura du mal à faire face à la hausse de la consommation d’électricité. » Or, pour ce spécialiste, la France ne dispose d’aucune autre solution viable sur le plan économique. « L’électricité produite par l’éolien et le photovoltaïque coûte dix fois plus cher que l’électricité normale. Aujourd’hui, elle bénéficie d’une subvention de l’Etat, car elle concerne très peu de Français. Sans ce soutien financier, la plupart des consommateurs n’auraient pas les moyens de payer la facture. »

Selon le physicien, il existe des énergies renouvelables  »rentables », mais les stocks arrivent à saturation. « En 1960, 56 % de l’électricité était fabriquée grâce à l’hydraulique. Aujourd’hui, ce chiffre est tombé à 10 %, parce qu’il n’y a pas assez de barrages pour faire face à la demande. » D’où l’intérêt du nucléaire, que Christian Ngô juge bon marché.

« Ce qui coûte le plus cher dans le nucléaire, c’est l’investissement initial. Ensuite, le prix de l’électricité est à la fois compétitif et stable. » Enfin, le physicien soulève un problème de taille : le solaire et l’éolien sont des énergies intermittentes. « On ne peut pas savoir quand le vent va souffler, et il n’y a pas de soleil la nuit… Si on utilisait les énergies renouvelables comme une source d’énergie de base, on serait obligés de développer des centrales très polluantes qui utilisent du pétrole, du gaz ou du charbon pour servir de complément. C’est un énorme handicap. » Selon lui, cela ne fait aucun doute : « Les centrales nucléaires françaises marchent bien, il n’y a aucune raison de les arrêter. En revanche, il faut tenter de réduire notre consommation d’énergie par tous les moyens. »

Scénario 2 : réduction de la dépendance à l’atome

Les experts ne se bousculent pas pour se prononcer en faveur de l’arrêt du nucléaire. Mais ils consentent à étudier sérieusement la réduction de son usage. Cédric Philibert, spécialiste des énergies renouvelables à l’Agence internationale de l’énergie, et Jean-Marie Chevalier, professeur d’économie à Dauphine, spécialiste de l’énergie, s’accordent pour dire qu’un abandon total du nucléaire en France n’est pas envisageable, même à long terme.

« Fermer des centrales qui produisent l’électricité dont nous avons besoin dans des conditions économiques et de sécurité satisfaisantes n’aurait aucun sens. On n’arrête pas une machine qui marche », s’insurge l’économiste. Le seul scénario plausible et pertinent ? Réduire progressivement notre dépendance à l’atome.

« La première étape serait de faire des économies d’énergie et de renforcer l’efficacité énergétique. L’abandon du chauffage électrique et la rénovation des bâtiments anciens permettraient, par exemple, de diviser par quatre la consommation d’énergie consacrée au bâtiment », estime Cédric Philibert.

Seconde étape : réduire la part du nucléaire dans notre production d’énergie, au profit d’autres sources d’énergie. « Toutes les sources d’énergie ont leurs avantages et leurs inconvénients, l’idéal est d’en combiner plusieurs », explique Jean-Marie Chevalier. Très en retard par rapport à ses voisins, la France peut se tourner vers les énergies renouvelables.

En tête de liste viennent les énergies solaire et éolienne ;  »mais nous pouvons aussi développer d’autres formes d’énergie : le potentiel de nos forêts est sous-évalué, nous pouvons aller plus loin dans l’énergie hydraulique et la production de biogaz », estime l’économiste. L’objectif fixé par l’Europe de 23 % d’énergies renouvelables dans notre production énergétique d’ici à 2020 « est tenable » : « Cela aura un coût, certes, mais notre génération doit en passer par là. »

Scénario 3 : Sortie progressive du nucléaire

« A l’horizon 2050, la disparition totale du nucléaire est tout à fait envisageable, à condition de se projeter suffisamment loin dans l’avenir pour orienter dès maintenant nos décisions dans ce sens. » Ces propos ne sont pas ceux d’un militant écologiste, mais ceux d’Yves Marignac, consultant en énergie.

Il a collaboré à négaWatt, collectif d’ingénieurs qui travaille à l’élaboration d’un scénario de sortie du nucléaire en France, tout en respectant les impératifs de réduction d’émissions de gaz à effet de serre. « Evidemment, on ne peut pas arrêter nos 58 réacteurs demain. Pour l’instant, la France est prise au piège, car elle est très dépendante du nucléaire. En Allemagne ou au Japon, le nucléaire fournit seulement 30 % de l’énergie », précise Yves Marignac.

Selon lui, un système fondé exclusivement sur les énergies renouvelables est parfaitement réaliste, car le potentiel d’ensoleillement, de vent et de biomasse est élevé en France. Et il balaie d’un revers de main l’argument économique.

« Les coûts de production des énergies renouvelables et du nucléaire sont équivalents : un réacteur EPR coûte 60 € par mégawattheure, comme les éoliennes les plus performantes. Et le nucléaire a des coûts cachés de plus en plus lourds : le stockage des déchets pèse 35 milliards d’euros par an, l’accident de Tchernobyl a été évalué à 500 milliards de dollars… »

Le député d’Europe Ecologie-Les Verts Noël Mamère propose un scénario encore plus ambitieux « de sortie progressive du nucléaire d’ici à vingt-cinq ans ». « C’est une question de volonté politique, insiste-t-il. En couplant économies d’énergie, efficacité énergétique et promotion des énergies renouvelables, nous pouvons y arriver. Il faut faire entrer la démocratie et la transparence dans le nucléaire, en finir avec la culture du lobby. » Noël Mamère plaide pour l’ouverture d’un débat devant la population qui pourrait déboucher sur un référendum ou sur une loi afin de planifier la sortie du nucléaire. Il se dit « plutôt favorable à cette deuxième option »


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