Laurent Joffrin feint-il de ne pas connaître le dossier quand il écrit « l’ennui, c’est qu’outre la transparence de la manœuvre politique, le dossier se complique quelque peu sur le fond. Le maire de Paris a déjà tissé des liens avec ses communes limitrophes. » Soit, la ville de Paris a signé quelques conventions avec des communes de banlieue et surtout elle a lancé depuis deux ans la Conférence métropolitaine. Mais Laurent Joffrin ne doit pas ignorer que cette instance n’est qu’une réunion de bonnes volontés sans pouvoir de décision, et qu’elle a elle-même décidé d’aller plus loin et d’ouvrir des Assises de l’agglomération parisienne après les municipales. Et de là à dire que le problème est réglé, les avatars de vélib’ de part et d’autre du périphérique devraient appeler à un peu plus de lucidité pour constater qu’on est loin du compte.
Quant à la région elle lui semble à la fois la bonne échelle et la bonne équipe pour régler le problème de l’agglomération parisienne. Laurent Joffrin a-t-il vraiment une dette envers Jean-Paul Huchon dont il écrit que « l’efficacité à la tête de la région et le sens de l’ouverture politique sont reconnus jusque par ses adversaires » ? Comment peut-il reprendre à son compte que « la distribution de l’eau, le ramassage des ordures ou les transports sont déjà l’objet de regroupements qui donnent satisfaction. » Certes il y a des syndicats qui fonctionne, mais c’est aussi à se demander à propos des transports si Laurent Joffrin utilise parfois le RER, A, B, C ou D au choix, tant le service est aussi mauvais sur une ligne que sur l’autre, ou encore les lignes saturées du métro, comme la 9 qui enfile incident sur incident, sans parler de la 13 qui est un incident à elle toute seule. Et sur l’efficacité de la région dans le domaine des transports, je ne peux m’empêcher de proposer à nouveau cette anecdote édifiante rapportée par Christian Sautter, lors d’une réunion du STIF, le Syndicat des Transports d’Ile-de-France présidé par Jean-Paul Huchon au titre de la région.
Alors quand en conclusion, Laurent Joffrin écrit « serait-ce très rationnel d’empiler les structures, alors que la coopération entre celles qui existent peut aboutir au même résultat au moindre coût ? Ou bien faut-il souscrire à la dispendieuse et habile offensive sarkozienne ? » on peut lui répondre que d’une part, ça ne marche pas et que c’est le constat sur lequel tout le monde s’accorde à part Laurent Joffrin, et que d’autre part, créer le Grand-Paris ne revient pas automatiquement à empiler une nouvelle structure, mais peut aussi être une simplification par remplacement, et que ce n’est pas forcément une idée Sarkozienne ! Le président ayant d’ailleurs à cet égard des prises de position à géométrie variable. Et la gauche aurait tout intérêt à ne pas laisser la droite préempter le Grand-Paris, tant ce projet dépasse les clivages politiques.
Mais il y a un dernier point qui me fait réagir. Libération a eu beau glisser le mot « ville » derrière son logo à la une du dossier, ce qui me choque le plus dans ce genre d’éditorial, c’est de refuser de voir ce qu’est la Ville. Dire que pour s’occuper de cette Ville, au sens de Paris intra et extra muros, dont le SDRIF a fini par accepter de reconnaître la spécificité à travers la notion de zone dense, le bon échelon serait la région c’est nier cette reconnaissance même de la Ville. C’est une vision étroite qui rejette cette autre partie de la Ville qu’est la banlieue avec ses habitants. C’est faire la démonstration de la théorie de Jacques Donzelot sur la ville à trois vitesses, de cette ville qui se défait par la victoire de l’entre-soi. Paris reste Paris, et la banlieue la banlieue. Pour revenir au Grand-Paris, la question n’est pas une pauvre bataille politicarde, Laurent Joffrin, c’est celle de notre société. Ce n’est pas la bataille des limites du Grand-Paris. Certains le veulent plus resserré, limité à la petite couronne pour des raisons pragmatiques, moi je le voudrais plus vaste, là où il est déjà, couvrant toute la zone dense, de Notre-Dame aux Villes nouvelles des années 60. Mais c’est plus difficile, à réaliser. Faute de volonté politique. Allons réfléchissez Laurent Joffrin, et sachez que je vous préfère lorsque vous questionniez le président de la République sur la monarchie élective que lorsque vous vous égarez dans le Grand-Paris ;-)
Jean-Paul Chapon
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