Toujours est-il que le Conseil de Sécurité de l'Onu s'est décidé à mettre en oeuvre des frappes aériennes, ce vendredi 18 mars. Dans la résolution adoptée, il s'agit avant tout de prendre "toutes les mesures nécessaires" pour protéger les populations civiles face aux armées du guide libyen.
Mais cette décision entraîne une cohorte de questions. Sans évocation d'objectifs à moyen terme, et telle qu'elle se met en place, cette intervention prend la forme d'une simple mesure de coercition. Il s'agit de stopper les forces gouvernementales dans leur conquête du bastion de l'insurrection qu'est la ville de Benghazi, et de pousser à un repli. Mais dans quel but? Un statu quo est impensable dans le cas libyen : il ne s'agit pas d'une revendication d'indépendance, pour laquelle il serait plus aisé de délimiter des territoires et organiser des pourparlers. D'autant que le Conseil national libyen, regroupant les opposants au colonel, rejette lui-même toutes négociations avec le régime.
Alors, peut-être faudrait-il armer les insurgés, et, comme dans le cas du Kosovo en 1999, coordonner frappes aériennes occidentales et avancées des rebelles au sol, avec un appui logistique toujours occidental. Mais encore faudrait-il que le Conseil national libyen soit reconnu de toute la communauté internationale. La France s'est empressée de le faire, mais d'autres états trainent des pieds. Le Conseil européen le reconnaît comme un "interlocuteur politique", mais il faudra lui donner plus de légitimité pour pouvoir, "officiellement", le soutenir militairement. Par ailleurs, Pékin et Moscou ne permettront sans doute pas d'aller jusque-là, pas plus que d'envoyer une force de coalition de forces terrestres sous mandat onusien.
Vraissemblablement, les frappes aériennes viseront, dans un premier temps, l'infanterie qui fait route vers Benghazi, tout en clouant au sol la flotte aérienne pour empêcher tout bombardement de la région. Peut-être, dans un second temps, ces frappes seront élargies à d'autres objectifs militaires : bases militaires, postes de commandement, infrastructures de communication. Mais quid du colonel Kadhafi lui même et de sa garde rapprochée?
Toutes ces questions doivent trouver des réponses rapidement, car on ne sait qu'elle sera la réaction du guide libyen et quelles seront les répercutions sur sa population. Peut-être qu'à l'inverse, rien de tout cela ne sera mis en place. Mais lorsque l'on entreprend une mesure de coercition, il ne faut pas la mettre en oeuvre au dernier coup de fusil, lorsque la guerre est sur le point d'être remportée par celui que l'on veut précisément contraindre. Maintenant, c'est du tout ou rien.