Un parlementaire évoque cette jurisprudence :
La question :
M. Yves Bur attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, sur les effets d'une décision récente du Conseil d'État en matière de procédure d'élaboration ou de révision de plan local d'urbanisme (CE, 10 févr. 2010, n° 327149, Cne de Saint-Lunaire). La haute juridiction a jugé qu'il résulte des dispositions de l'article L. 300-2-I du code de l'urbanisme que la délibération du conseil municipal prescrivant l'élaboration ou la révision d'un PLU doit porter, d'une part, et au moins dans leurs grandes lignes, sur les objectifs poursuivis par la commune lorsqu'elle projette d'élaborer ou de réviser un document d'urbanisme et, d'autre part, sur les modalités de la concertation qui doit associer les habitants, les associations locales et les autres personnes concernées. Il a été confirmé que cette délibération constitue dans ces deux volets une formalité substantielle dont la méconnaissance entache d'illégalité le document d'urbanisme approuvé, alors même que la concertation aurait respecté les modalités définies par le conseil municipal. Cette jurisprudence très récente, en soi peu critiquable tant les termes de l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme paraissent dépourvus de toute ambiguïté, place toutefois de nombreuses collectivités publiques dans une situation délicate : nombre de communes élaborent leur document d'urbanisme conformément aux instructions données par les DDE, celles-ci allant jusqu'à fournir les modèles des délibérations et arrêtés jalonnant l'élaboration ou la révision du PLU. Ces modèles largement diffusés n'attiraient pas l'attention des élus sur la nécessité de délibérer sur les objectifs poursuivis. De nombreux documents de planification locale - qu'ils fassent actuellement l'objet de contentieux ou qu'ils soient en cours d'élaboration et susceptibles ultérieurement d'être contestés - sont affectés par ce vice de procédure. Or l'élaboration d'un tel document, longue et coûteuse pour les collectivités publiques, répond également à des impératifs d'aménagement du territoire. Une annulation implique un retour au document d'urbanisme antérieurement applicable, souvent obsolète, sinon même au règlement national d'urbanisme privant le maire de la possibilité de délivrer au nom de la commune les autorisations d'urbanisme ou de préempter. Alors que les moyens actuels permettent une excellente diffusion de la jurisprudence du Conseil d'État, il est à redouter une multiplication des annulations des PLU fondées sur ce motif. La contagion est également à craindre pour les SCOT (schémas de cohérence territoriale), les ZAC et autres opérations d'aménagement à l'initiative des communes, également soumis au respect des prescriptions de l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme. En conséquence, il lui est demandé s'il est envisagé éventuellement, dans le cadre de l'habilitation qui lui a été conférée par la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement ou par tout autre moyen, de prendre les mesures nécessaires pour enrayer ce risque d'annulation pesant sur nombre de documents de planification locale ou d'aménagement élaborés ou approuvés avant l'intervention de cette jurisprudence.
La réponse :
L'article L. 300-2 du code de l'urbanisme institué par la loi 85-729 du 18 juillet 1985 prévoit que la commune ou l'établissement public de coopération intercommunale (EPCI) compétent doit délibérer, dans le cadre de la révision ou de l'élaboration d'un plan local d'urbanisme (PLU), sur les objectifs poursuivis, mais également sur les modalités de la concertation qui associe les acteurs intéressés. Il s'agit de conditions cumulatives, comme l'a récemment rappelé le Conseil d'État, en précisant toutefois que la délibération doit porter sur les objectifs poursuivis « au moins dans leurs grandes lignes » (Conseil d'État, commune de Saint-Lunaire, 10 février 2010). Les formalités prévues par l'article L. 300-2 sont justifiées et le Gouvernement n'envisage pas leur modification, d'autant plus qu'elles sont conformes à l'article 7 de la charte de l'environnement du 1er mars 2005, texte à valeur constitutionnelle qui prévoit que toute personne a le droit de participer à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement. Le Conseil d'État comme le Conseil constitutionnel ont d'ailleurs jugé que ces dispositions à valeur constitutionnelle s'imposent aux pouvoirs publics et aux autorités administratives (Conseil d'État, 3 octobre 2008, commune d'Annecy ; conseil constitutionnel, décision « OGM » du 19 juin 2008). Cette obligation de délibérer sur les objectifs poursuivis et sur les modalités de la concertation faisait d'ailleurs l'objet d'un chapitre spécifique à la concertation et à la nécessité de mentionner les objectifs poursuivis dans le guide des plans d'occupation des sols (POS), édité en 1999 par les services du ministère de l'équipement, des transports et du logement et a, depuis lors, été rappelée par les services de l'État (question orale n° 839 du 2 juin 1999, réponses ministérielles à l'Assemblée nationale n° 70 644 du 18 mars 2002, n° 24 374 du 27 janvier 2004). Cela étant, un travail de pédagogie est bien sûr nécessaire et, dans le cadre du plan d'accompagnement de la mise en oeuvre du volet urbanisme du Grenelle, des actions d'information seront développées afin de faire connaître les dispositions nouvelles et tenir compte des évolutions légales et jurisprudentielles récentes. Les formalités prévues par l'article L. 300-2 y auront bien sûr une place particulière. De manière plus générale, le contentieux de l'urbanisme est un sujet sensible et complexe. Il est en effet nécessaire, du fait de la pénurie de logements et des difficultés rencontrées par le secteur immobilier, de faciliter les opérations de construction, notamment de logements. Cela passe nécessairement par une sécurisation juridique des procédures d'urbanisme. Par ailleurs, le Grenelle de l'environnement a démontré le rôle essentiel des associations et des citoyens dans la protection de l'environnement. Le droit au recours en est un des aspects et est garanti par des normes internationales et constitutionnelles. Les réflexions engagées sur la simplification de l'urbanisme viseront notamment à améliorer la sécurité juridique des documents de planification et des autorisations d'urbanisme, dans le respect du droit de recours.