Tu ne lèveras point la main contre ton frère,
Et tu ne verseras aucun sang sur la terre,
Ni celui des humains, ni celui des troupeaux,
Ni celui des poissons, ni celui des oiseaux.
Un cri sourd dans ton coeur défend de le répandre,
Car le sang est la vie, et tu ne peux la rendre.
Tu ne te nourriras qu'avec les épis blonds
Ondoyant comme l'onde au flanc de tes vallons,
Avec le riz croissant en roseaux sur tes rives,
Table que chaque été renouvelle aux convives,
Les racines, les fruits sur la branche mûris,
L’excédent des rayons par l'abeille pétris,
Et tous ces dons du sol où la sève de vie
Vient s'offrir de soi-même à ta faim assouvie :
La chair des animaux crierait comme un remord,
Et la mort dans ton sein engendrerait la mort !...
Alphonse de Lamartine-La chute d'un ange