Magazine Culture
Folio430 pages7,30 euros
Résumé:
" Il était une fois un assassin.Il était une fois une victime. Il était une fois une ville apparemment encline à favoriser leur rencontre. "
Que se passerait-il si le cruel Croquemitaine ressuscitait ? Et Dracula ? Et Barbe-Bleue ? Pire encore, imaginons le Chat botté, non plus au service du marquis de Carabas, mais comme un impitoyable serial killer, obsédé par l'infirmité. Et si Blanche-Neige, " lèvres rouges comme la rose, cheveux noirs comme l'ébène, et blanche comme neige ", n'était pas l'innocente que nous présentent les frères Grimm ? Après Les contes de crimes, Pierre Dubois détourne de nouveau les contes de fées.
Il nous en offre une version tour à tour drôle et terrifiante, nourrie d'un vocabulaire ensorcelant où l'extrême noirceur se combine au raffinement.
L'avis de Dup:
Je découvre avec ce livre un auteur dont l'écriture me ravie vraiment. Quel plaisir de lecture !Huit nouvelles... et pourtant je ne suis pas fan de ce style littéraire qui me laisse trop souvent soit sur ma faim, soit dubitative quant à la chute. Mais là, quel délice. L'auteur manie le cynisme, la dérision et l'humour à la perfection, le tout sur un ton de gentil conte que l'on pourrait ( mais notez bien le conditionnel là !) lire à nos enfants à la veillée. Les chutes sont énormes, sincèrement je me suis bien régalée.Bon, je vous rassure, je ne vais pas vous faire huit chroniques hein, mais une ou deux quand même.
Le chat botté: ( sans doute ma préférée )Un sérial killer pas comme les autres, dont les proies ne sont que des handicapés... Occire le malade, le boiteux ou le cul-de-jatte lui procure une jouissance suprême. Et jamais il ne se fait prendre, car bien sûr, la nuit tous les chats sont gris. Quand ses proies viennent à manquer, il déménage et s'attaque à une autre grande ville. Mais un jour vient l'illumination, il a trouvé son Eldorado: Lourdes... :))L'auteur nous décrit vraiment son personnage comme si c'était un chat, dans ses habitudes, ses manies, et même sa façon de penser, c'est excellent. Et le texte est entrecoupé de comptines qui tombent toujours à propos, un régal je vous dis !Exemple: Quand notre Chat drague une hémiplégique en vue de s'amuser un peu avant son crime, on a un petit passage ainsi:balançant de la queueet grignotant des dentsbalançant de la queueet grignotant-des-dents
La dame blanche: (euh...sans doute ma préférée)Elle démarre ainsi: Il était une fois un Petit vieux et une Petite vieille qui s'étaient tranquillement détestés tout le long des nombreuses années...Et Petit vieux n'avait la paix que lorsqu'il allait taquiner le poisson à la rivière, là où apparaît parfois la Dame Blanche qui enlève les méchants enfants qui ne sont pas sages. :) Ainsi passaient ses jours, et ses nuits dos à dos, couchés avec les poules, levés avec le coq. Puis un jour, Petit vieux se dégrade, n'a plus goût à rien, même plus à la pèche. Il se traîne, il ne bougonne même plus, il reste prostré et bave dans son fauteuil. Alors Petite vieille, malgré le coût probable, l'emmène chez le médecin qui prescrit un traitement...P 126 : Les médicaments firent en effet effet au joli temps renaissant du coucou, ainsi que leurs effets secondaires... Un matin, à son insu, le Petit vieux se réveilla aussi rapidement membré qu'un faune de la mythologie gréco-lutine en rut.76 ans quand même Petit vieux !!! Seulement voilà, Petite vieille ne veut pas ! :))P129 : Pauvre Petite vieille, il aurait fallu si peu pour calmer Petit vieux.Mais Petite vieille n'a rien voulu savoir, et ailleurs Petit vieux est parti voir. J'adore !!!Et non, je ne vous dévoilerai pas la suite, mais elle vaut son pesant de cacahuètes, promis !!!!
Allez, une petite dernière car... c'est sans doute ma préférée :))))Le conte de Dracula:Elle est énorme celle-ci aussi. L'histoire d'abord, que l'auteur fait se dérouler au fin fond du Finistère, la chute mais aussi et surtout le ton utilisé pour narrer ce conte.En résumé, la jeune et jolie Rozenn Le Galec, 15 ans, se fait violer sur le chemin du retour vers sa maison où elle s'occupe seule de sa mère. Mais le vilain méchant, qui meurt juste après son méfait, l'a tatoué sur les seins: Dra sur l'un, cula sur l'autre...Comment vivre une vie normale à partir de là ? Je sais, c'est dramatique mais moi, en écrivant cette mini-chronique, je suis morte de rire !!!Pour vous montrer le ton de l'auteur, un petit extrait de la description de la mère de Rozenn:P 288 : Las, la pauvre femme avait perdu deux enfants en couches, son mari en mer, l'usage de ses jambes à la tâche, l'appétit dans la quotidienneté mélancolique des jours et, aussi, un peu la tête. J'adore !Un autre petit passage: Monsieur le Maire vient faire sa demande en mariage à la pauvre Rozenn qui outre sa virginité a également perdu sa mère peu de temps après.P 291 : Tout se passa très mal.Il était encore trop tôt pour Rozenn. La blessure trop fraîche, le tatouage trop présent, le souvenir trop cuisant. Au début elle se contint, occupée qu'elle était à préparer le thé, l'assiette de Traou Mad et de sablés au beurre salé. Mais lorsque la présence du maire se fit plus pesante, la main plus pressante, lorsque la moustache se fit plus pubienne, elle sentit malgré elle sa paupière s'agiter de tics nerveux. (...) Je coupe là car après cela spoile...héhéhé (rire sardonique)
Bref, je me suis régalée et je ne peux que vous conseiller ce recueil ! L'écriture est délicieuse, le détournement des contes d'origine d'une imagination débordante, rien que du bon quoi !!!