Sans Olivier la fête de la vie n‘aura plus lieu. Jamais. Depuis, Jérôme avance dans l’existence à pas comptés. « Longtemps, je me suis préféré » note Garcin. Phrase proustienne d’un récit dont la madeleine laisse un goût entêtant d’amertume. Vaine tentative d’effacer l’omniprésente meurtrissure. Pas loin d’un demi-siècle plus tard, tenaillé par ce que Nicolas de Staël appelait la fulgurance de l’hésitation, l’amputé s’acquitte de la promesse faite à son membre fantôme. Pourquoi maintenant ? Nous ne sommes pas toujours en mesure d’appréhender les injonctions mystérieuses qui nous gouvernent. Jérôme Garcin a évité les mirages de l’analyse. Que serait-il allé faire dans cette cour des miracles ? A la rigueur le divan du docteur Baudelaire « Et les vagues terreurs de ces affreuses nuits/ Qui compriment le cœur comme un papier qu’on froisse ? ». De son théâtre intime, l’homme est à la fois le dramaturge, le brigadier et le spectateur. Les billets de faveur se négocient âprement.
Ce qui aurait pu n’être qu’une littérature de l’infortune est devenu un récit taillé sur mesure dans la lumière de l’entre chien et loup, dans l’étoffe de ce moment où l’on sait certes que les blessures invisibles refusent obstinément de cicatriser, mais que l’on peut les tenir en respect avec un chiffon de soleil imbibé de silence.
Olivier de Jérôme Garcin Editions Gallimard Crédit Photo C.Hélie