Laissez-moi vous parler de la maison

Publié le 14 mars 2011 par Mpbernet

Le soleil est radieux en cette matinée. Le calme règne, on entend les oiseaux chanter dans les fleurs retrouvées. Un couple de mésanges se poursuit dans les gousses de glycine, prêtes à éclore en grappes bleues. Il y a tout de même du vent, les branches se balancent. Je regarde par la fenêtre la cime des arbres onduler.

Nous avons acheté cette maison en décembre 1987, et nous nous y sommes installés à Pâques 1988. Elle est située au bout d'un chemin creux, entièrement recouvert de verdure dès les premiers feuillages poussés. Ce chemin n'est pas goudronné. On hésite avant de s'y aventurer. Il s'évase au moment de tourner vers le fond de la vallée du Boudouyssou, un ruisseau dont le cours a dû être capté quelque part en amont, car il est à sec depuis des lustres. Cette ancienne bergerie compte trois bâtiments. Et un très ancien noyer noueux, majestueux, dans sa cour.

La plus ancienne des constructions porte une date : 1765. C'est sans doute la ferme originelle : une pièce en partie enterrée qui sert de cuisine-salle de jeux-chambre d'enfants-buanderie. Juste au-dessus est la chambre d'Anne-Christine et Laurent.

A quelques pas, une construction plus récente, sans doute du début du XXème siècle, qui devait être la maison d'habitation des fermiers devenus plus à l'aise : une pièce commune et une chambre. C'est là que nous entreprenons des travaux de remise à niveau de la petite salle d'eau, pour Florence et sa famille.

Enfin, ce que nous appelons la "grande maison" et qui fut la grange et la bergerie. A moitié enterrrée elle aussi, rénovée dans les années 60 par des hollandais, dotée d'une piscine par les précédents propriétaires Lissa et Bernard. Nous n'y avons pas touché, sauf la création d'une salle de bains il y a quelques années, pour la chambre de Victoire et Timothée. On discerne très bien, à travers le dessin des pierres apparentes, où se trouvaient certaines ouvertures. Les murs ont une épaisseur d'environ 60cm : autrefois, on bâtissait deux coques de pierres sèches espacées de la longueur de 2 pieds et on garnissait de terre ou de matériaux moins nobles l'interstice. Depuis, on a aussi crêpi certaines façades, mais ce revêtement s'est délité avec le temps. La maison ne comporte pas de sous-sol, elle est assise sur la roche, elle vit en symbiode avec la terre qui l'entoure.

La maison est orientée selon un axe Nord-Est/Sud-Ouest : nous avons le soleil dès le matin, et le soir, quand il fait très chaud en été, le soleil passe du côté où la maison comporte moins d'ouvertures, la façade principale qui regarde vers la vallée de la Lémance est à l'ombre. Les anciens savaient comment construire, eux. Les fenêtres sont parcimonieuses, elle donnent de la lumière juste ce qu'il faut. On apprécie beaucoup en pleine chaleur. Dans le salon, on repère les vestiges des "corbeaux" qui forment la jointure entre l'espace dédié au stockage des foins et l'espace bas réservé au troupeau. Deux piliers centraux soutiennent la charpente. Ici et là, quelques pierres brunes, à la forme ronde, sont emprisonnées au coeur du mur, au milieu du calcaire : ce sont des morceaux contenant une forte proportion de minerai de fer, qui affleurent partout dans la région.

Voici donc notre hermitage, bien calme en cette saison, si bruyant de cris d'enfants l'été, quand tout ou partie de la famille est réuni. Nous nous y ressourçons depuis plus de 20 ans. C'est notre thébaïde.