1948 indépendance d'Israël un écrivain s'interroge
Un jeune soldat israélien participe aux opérations de regroupement et d’expulsion des populations qui jusqu’alors vivaient sur ces terres, cultivaient le sol et il commence ainsi son récit : « Il est temps de rompre le silence et d’exposer les faits ». Les jeunes soldats se sont vus fixer une mission, tout d’abord « se méfier de la perfidie des habitants » et aussi « isoler l’ennemi sur une colline » , ils combattent depuis des jours, certains sont épuisés, d’autres appréhendent les événements à venir.
Lorsque le peloton entre dans les villages ils trouvent des maisons abandonnées « la rumeur et la peur avaient porté leurs fruits » , les quelques arabes encore présents sont terrifiés.
Le peloton détruit les biens des villageois, expulse femmes et enfants « avec fermeté mais sans débordement ni dérapages » du moins ce sont les ordres reçus. Car en fait moqueries, humiliations, coups rien n’est épargné aux derniers occupants composés essentiellement de vieillards, de femmes, de bébés. Des hommes et des femmes qui passeront des années dans de camps de fortune.
Camp de réfugiés palestinien, 1948 (photo UNRWA)
Et S.Yizhar nous fait entrer dans la tête des membres de ce peloton, ceux qui sont effrayés par les ordres, qui éprouvent remords et culpabilité et ceux qui aveuglés par la haine sont près à invectiver, terroriser, tuer sans s'interroger.
Après son passage dans le village d’Hirbat Hiza l’armée laisse un village déserté où pourront venir s’installer dans quelques jours des colons israéliens.
Un village en 1945
Et pourtant la terre palestinienne et la terre israélienne se ressemble, c’est toute la beauté des paysages de cette terre que l’auteur parvient à nous restituer « la vallée se dévoila soudainement à nous. Elle était baignée de la lumière limpide de ces matins hivernaux aux reflets bleutés qui deviennent presque dorés à mesure que le soleil inonde la terre et révèle une palette infinie de teintes, entre le vert et l’ocre, autant de taches riantes et généreuses, de bandes formant les champs, de sinuosités que décrivent des sentiers : tout un riche tapis subtilement tissé par des générations de paysans. »
En 1949 350 000 Palestiniens prennent la route de l'exode, fuyant les combats ou expulsés des zones contrôlées ou conquises par Israël. Exode, diaspora, un vocabulaire qui sonne d’étrange façon lorsqu’il s’agit d’un peuple victime lui même et qui l’impose à un autre peuple.
Ecrit en 1949 ce texte n’a rien perdu de sa force, de sa vérité et bien que l’auteur ait été qualifié de traitre à l’époque, on peut estimer qu’ « Il y a un lien direct entre Hirbat-Hiza et les mouvements pacifistes d’aujourd’hui, constitués d’êtres humains ordinaires qui refusent, quelles que soient les circonstances, de prêter la main à l’injustice. » Voici les paroles de David Shulman qui écrit la postface à cette édition et qui milite lui aussi dans les mouvements pacifistes.
J’ai lu ce livre après ma lecture de Naguère en Palestine, c’est Miriam qui m’a offert cette référence, car il s’agit bien là d’un cadeau.
A mon tour je vous l’offre pour qu’il prenne place dans votre bibliothèque.
Des avis sur ce livre
« Passer à côté de ce livre très intelligemment édité par Galaade serait une erreur capitale » dit Miriam
« Yizhar était un grand écrivain. Peut-être le plus grand des écrivains du jeune État d’Israël. » – Shimon Peres
« Le récit de S.Yizhar s'offre avec l'évidence et la simplicité des chefs-d'oeuvre. » Livres Hebdo
« Des années après les événements tragiques qu’il décrit, Hirbat-Hiza continue à déranger par son à-propos. » The Times Literary Supplement
Le livre : Hirbat-Hiza - S Yizhar - Traduit de l'hébreu par Laurent Shuman - Editions Galaade 2010
L’auteur
Professeur de littérature à l’université de Tel Aviv il a publié trente romans et essais. Lauréat de nombreux prix il est considéré comme un des plus grands écrivains israéliens. ( source l’éditeur)