A propos de Fighter de David O.Russell 2.5 out of 5 stars
A Lowell, Massachusetts, la carrière de boxeur de Micky Ward tarde à décoller. La faute à un entourage familial pesant et qui freine son ascension. Son demi-frère Dicky est son coach et une ancienne gloire de la boxe, mais il est aussi devenu un adepte du crack constamment en retard aux entrainements. La mère oppressante de Micky ne fait qu’empirer les choses. Un jour, Micky rencontre une serveuse de bar qui va révolutionner sa manière de travailler…
Fighter, c’est l’illustration parfaite de l’American Dream. Croyez en vos rêves, ils se réaliseront. Qui que vous soyez, d’où que vous veniez, vous réussirez à devenir le meilleur à force d’abnégation et de courage. C’est un peu le message du film. Pourtant, Fighter est fidèle à la biographie du véritable Micky Ward dit « l’Irish », né en 1965. Célèbre pour la remontée fantastique qu’il entama après longue une série de défaites, Ward gagna son titre de champion du monde WBU en 2000 avant de se distinguer dans trois combats de boxe mythiques contre le canadien Arturo Gatti. Mais la peinture de David O.Russel ne verse pas toujours dans les nuances ni la légèreté.
On reviendra plus tard sur les grandes prestations de Bale (Dicky) et Wahlberg (Micky) ainsi que celle de Melissa Leo (la mère de Dicky et Micky). Fighter se distingue surtout pour la composition de ces trois là. Au cœur du film, le portrait d’une famille de la « middle class » américaine envahissante voire étouffante pour Micky. Les sœurs de Micky, agglutinées dans le salon, sont des mégères aux chevelures massives et permanentées à la mode des années 1980. Le père de Micky, brave type au demeurant, est bouffé par la mère charismatique des deux frères. Et tout ce petit monde passe son temps à s’envoyer des assiettes à la figure tandis que Dicky se shoote au crack.
Fighter cherche à tout prix à filmer ces scènes de famille sur un rythme enlevé, à capter la fureur et la frénésie qui caractérisent les Ward, entre scandales et incartades interminables. L’effet est réussi mais à chaque fois comique, comme par exemple lorsque Dicky fuit sa mère en sautant par la fenêtre dans des sacs poubelle. On aurait aimé que le portrait des deux frères soit plus sombre ou intimiste, la description de Dicky plongeant dans le crack plus approfondie et réaliste. Il y a des raccourcis faciles parfois, comme la manière dont la petite copine de Micky, qui ne peut pas supporter Dicky, se réconcilie soudain avec lui pour le bien de Micky.
Ce n’est pas que ce portrait de famille soit superficiel, car O. Russel décrit bien l’hystérie collective qui règne chez les Ward, mais il en donne une image peut-être un brin simpliste voire caricaturale. Dans le souci sans doute de faire un film grand public ou de plaire au plus grand nombre. Fighter est construit en deux parties très distinctes. La première, un peu laborieuse et qui dure une heure, est consacrée aux échecs successifs de Micky, « coaché » par un frère drogué et absent et sous la pression permanente de sa mère qui lui organise des combats « foireux ». En dessous de tout, elle ne veut surtout pas s’avouer que Dicky, à qui la chaine HBO consacre un documentaire, est dépendant au crack.
Le film prend forme (et corps) dans la deuxième partie. Dans la dernière demi-heure, les combats qui jalonnent l’ascension fulgurante de Micky (qui a déjà 31 ans) deviennent prenants et sont remarquablement filmés. Apogée de sa carrière, le combat de Ward pour le titre mondial en professionnel contre Shea Neary à Londres est le clou du spectacle. Il donne lieu non seulement à la scène de boxe la plus captivante du film mais aussi un des combats les mieux filmés au cinéma.
Quant à Dicky l’hurluberlu, le camé funambule, il est joué par un très grand Christian Bale, au sommet de son art. Avec ses yeux écarquillés, sa figure décharnée, Bale parvient à prendre ces attitudes aériennes propres aux camés. Inquiétant corps squelettique en apesanteur. Dicky change dans la seconde partie du film. Après un long séjour en prison, il devient beaucoup plus sérieux. La mère tantôt survoltée, tantôt possessive voire accaparante, est jouée par une superbe Melissa Leo, à la limite de la syncope. Loin de l’extravagance et de la dinguerie de ces deux là, Wahlberg joue, comme souvent (notamment chez Gray), un personnage beaucoup plus introverti et en retrait. Avec Bale, il forme un duo de cinéma idéal et complémentaire. Deux frères inséparables. Dans la lignée des De Niro / Joe Pesci de Raging Bull…
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