«Mes étoiles filantes,
C'est étrange... Dans le vocabulaire courant, quand on perd son père, sa mère ou ses deux parents,
on dit qu'on est "orphelin".
Quand on perd sa femme, on dit qu'on est "veuf". Ou "veuve", quand c'est son époux.
En revanche, quand on perd ses enfants on ne dit rien. Il n'y a pas de mot pour désigner cet état.»
Dans la nuit du 10 au 11 août 2008, Paloma et Pénélope sont mortes dans l'incendie de la maison de leur grands-parents. Leur maman, Anne-Marie Revol, journaliste, leur écrit durant plus d'une année. Écrire pour exorciser, écrire pour vivre, écrire pour les faire exister... encore.
Soyons francs, ce n'est pas une lecture facile. Nous sommes beaucoup à avoir le réflexe de se protéger, de refuser de lire pour souffrir. « Un livre comme ça, ce n'est pas pour moi. » Et c'est juste. Parce qu'un livre comme ça, ce n'est pour personne. Parce qu'un tel livre ne devrait pas être.
Seulement voilà. Quand on donne la vie, on donne la mort aussi. C'est immonde, insupportable, contre-nature. Et cette boule dans la gorge, ce goût sordide dans la bouche, cette main qui vous tord les tripes, vous accompagnent, ne vous lâchent pas une seconde pendant et après avoir tourné les pages.
Alors pourquoi ? Pourquoi lire Nos étoiles ont filé ?
Parce que si Pénélope et Paloma ne sont plus, l'amour est présent dans chaque ligne. L'amour d'une mère, d'un père, d'une famille et surtout cet amour indéfectible, profond, unique d'un homme et d'une femme emportés dans les ténèbres.
Parce que Paloma et Pénélope ne sont plus un fait divers. Je les ai vues clairement ces petites puces jouer dans leur chambre et câliner leurs doudous préférés. Elles sont dans mes pensées et je ne les oublierais pas.
Parce qu'Anne-Marie Revol nous plonge avec une intense dignité dans l'intimité du deuil. Cette confrontation à la mort que cette société du lisse refuse. On ne meurt plus mais on décède, on part, on les quitte, on n'est plus, on succombe après une longue maladie. Cette confrontation essentielle qui permettrait d'éviter la bêtise crasse, l'ignorance et la maladresse dont certains peuvent faire preuve face au deuil d'autrui.
Parce que malgré la tragédie, la vie va, la vie bat, la lueur d'espoir, même si elle ne semble plus rien éclairer, n'est pas éteinte. Sans oublier l'humour, surprenant et salvateur ainsi que les beaux petits noms d'amour : « mes princesses, mes filles adorées, mes drogues douces, mes soupirs d'amour, mes pigeons voyageurs, mes Jane D'Arc, mes séismes, mes hirondelles, mes magiciennes, mes reines de beauté... »
Parce que je n'ai pas pu lâcher le livre avant la fin. J'ai beaucoup pleuré. Pour Pénélope et Paloma. Pour Anne-Marie et Luc. Pour leur famille. Pour mes amis qui ont perdu leur petit garçon de dix ans le 31 décembre 2010. Une dernière descente en luge avant de rentrer. Un virage. Une baraque à foins. Ce monde qui emporte les petites filles dans la nuit et les petits garçons dans la neige.
Parce qu'incroyable tour de force, les mots d'Anne-Marie Revol m'ont fait du bien. J'ai appris.
Stock, 396 pages courageuses et indispensables, 2010
Extrait...
« Mes Brioches Dorées,
Pour beaucoup, nous devrions être réduits à l'état de zombies alors que nous sommes bien vivants. Affirmer que nous sommes gais toute la sainte journée serait exagéré mais, depuis quelques mois, disons cet hiver, nous sommes heureux 80 % du temps. Si les 20 % restants sont des instants de vie misérables, en dépit de l'horreur de votre mort, Papa et moi sommes encore capables, avec une bonne dose de volonté, de nous enthousiasmer, de faire les idiots, de nous moquer, voire d'être carrément méchants ! Je me demande vraiment comment nos cerveaux sont construits. Cet été de fait est gênant, "malaisant"... Pourtant, et bien que cela me défrise, je suis obligée d'admettre que c'est ainsi : nous sommes debout, face au vent et on avance. »
Lu également par...
Amanda, Ankya, Lizalou, Maeve...
Deux interventions d'Anne-Marie Revol sur France Inter...
L'émission Service Public du 30 novembre 2010 sur le thème « Accidents domestiques : pourquoi les détecteurs de fumée sont ils indispensables ? », avec Fanny Guibert, Anne-Marie Revol, Lieutenant Colonel Jean-Luc Queyla (cette émission est disponible en écoute à la carte).
et ici...
Anne-Marie Revol milite pour les détecteurs de fumée
Un dossier de 60 millions de consommateurs ici
Par Theoma - Publié dans : Romans français - Communauté : Salon LectureEcrire un commentaire 2 - Voir le commentaire - Voir les 2 commentaires - Partager ' ); YAHOO.util.Selector.query( 'input', dial.getEl(), true ).focus(); }, this, true ); return false; " title="Partager par adresse simplifiée"> Précédent : J'ai aimé... ils sont en poche ! Retour à l'accueil