Beaucoup ont écrit sur la Chine, parfois même après un séjour de quelques semaines!!
Mais il est des rocs: Lucien Bodard, que j'ai lu, Francis Deron (ancien du Monde) que j'ai croisé à Pékin plusieurs fois dans les années 96/98, Eric Meyer un ami installé depuis 1987 à Pékin et qui fait un travail de journaliste remarquable et a publié de nombreux livres et bien sûr Caroline Puel , enracinée en Chine , dont le dernier ouvrage, Les trente ans qui ont changé la Chine est des plus pénétrants.Caroline Puel a fondé le bureau de Libération en Chine et celui du Point dont elle est toujours la correspondante. Elle a reçu le prix Albert Londres pour ses reportages sur ce pays qu’elle sillonne depuis près de trente ans.Son étude très dense allie donc témoignages personnels et observation distancée des événements.
Trente années de croissance vertigineuse ont un prix
Sur le plan économique, Caroline Puel montre comment la Chine, encore miséreuse au sortir de la Révolution Culturelle, s’est hissée au deuxième rang mondial. Après trente années de croissance vertigineuse, tirée par les exportations et les investissements étrangers, la Chine dispose à présent des premières réserves de change mondiales et elle est devenue le banquier des Etats-Unis. « Pékin, note-t-elle, a maintenant la volonté de passer à un meilleur système de redistribution et de développer, une ‘économie verte’ axée sur les énergies propres et les nouvelles technologies » Car le décollage économique chinois s’est fait au prix d’un coût humain et d’une pollution gigantesques, ainsi que d’un incroyable gaspillage des ressources du patrimoine. Ce sont ces défis que devront relever Xi Jinping, récemment désigné comme successeur du Président Hu Jintao.
Yue MInjun, "Ocean Brain 2"
Si la Chine est confrontée à des problèmes très réels (jacqueries, absence de protection sociale, revendications identitaires et ethniques…), elle ne s’est pas moins dégagée du peloton de tête des gagnants de ce gigantesque bouleversement que représente la crise financière. C’est ce dynamisme qui permet à la Chine de redistribuer les cartes et d’imposer ses volontés dans le domaine stratégique : politique de développement en Afrique, question nord-coréenne, réforme des Nations Unies. Parallèlement, « l’ouverture de lignes aériennes directes entre la Chine et Taïwan, ainsi qu’entre la Chine et l’Angola le 15 décembre - 2010 - souligne à quel point le ralentissement mondial précipite des évolutions qui se dessinaient depuis des années » (p. 394).Accélération de l’histoire d’une part, accélération de la médiation de l’autre, car la Chine dispose, en la matière, d’une très riche expérience qui lui aura permis, au cours de ces trois dernières décennies, de participer - dans un premier temps - aux principaux événements culturels et médiatiques internationaux (festivals cinématographiques, biennales d’art contemporain…) avant d’en devenir l’un des organisateurs majeurs (jeux olympiques de Pékin, exposition universelle de Shanghai).
L’ouvrage de Caroline Puel consacre une large place à ces aspects qui ont accompagné, à grand renfort de rhétorique, l’« ascension pacifique de la Chine ». De ce point de vue, les années croisées France-Chine (2004-2005) auront constitué un banc d’essai pour une diplomatie culturelle chinoise en pleine restructuration. Elle est depuis lors acquise au multilatéralisme. Pékin a réédité, en effet, cette opération avec la Russie, puis la Grèce et l’Italie.Etendue sur un très large spectre, la diplomatie chinoise s’est totalement renouvelée depuis 1989. Elle a su jouer de l’attrait qu’exerce la Chine auprès des investisseurs étrangers, pour imposer ses conditions lors de la normalisation avec la plupart des démocraties occidentales. En étudiant la complexité de ces enjeux, Caroline Puel livre une synthèse magistrale sur l’histoire contemporaine de la Chine qu’il faut recommander à toute personne s’intéressant à ce grand pays.
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