Il est des titres d'exposition qui vous titillent plus que d'autres... Et si le choix s'était posé entre la fort belle mais néanmoins classique exposition "Dans l'atelier des menus plaisir du roi", du 19 janvier au 24 avril aux Archives nationales, et celle présente actuellement à la Maison-Rouge sous le nom de "Tous cannibales", c'est la seconde qui aurait agacé notre curiosité. Mais de choix, point : nous nous sommes rendus sur un coup de tête boulevard de la Bastille pour une visite psychanalytique de nos penchants anthropophagiques !
Car il s'agit bien de cela : le cannibalisme (le fait de manger un individu de sa propre espèce) et, par extension, l’anthropophagie (le fait de manger de la chair humaine, une forme de cannibalisme propre à notre espèce donc) ! Le sujet est plutôt surprenant, et, le moins qu'on puisse dire, c'est que la surprise est bonne : l'exposition, bien articulée, offre plusieurs aspects de ces deux pratiques en balayant une période assez large de l'histoire de l'art - même si la majorité des oeuvres proposées ont été produites par une jeune génération d'artistes. "Tous cannibales" croise et décroise allègrement les concepts ethnologiques, psychanalytiques, historiques, religieux, médicaux et interroge le visiteur sur son corps, son intégrité, les transformations et les traitements qu'il peut lui faire subir. Il est intéressant de souligner que, malgré la diversité et le nombre de représentations présentes dans cette exposition, rien n'est choquant ou écoeurant. Certes, on est dérangés, embarrassés ou déstabilisés parfois, on est perturbés, bouleversés... mais jamais par un premier degré trop facile ou des représentations trop évidentes qui tiendraient plus de l'effet spécial de cinéma... L'exposition aborde plutôt le cannibalisme vu sous un angle critique mais néanmoins délicat, une vision imaginaire et fantasmagorique, parfois même naïve.
De droite à gauche : Fat Man - The Matrix of Amnesia de John Isaacs, 1998 / Azulejaria branca em carme viva de Adriana Varejão, 2002 / Kissie Kissie de Melissa Ichiuji / Sündenbock de Norbert Bisky, 2005
C'est également l'occasion de revoir Vanitas : robe de chair pour albinos anorexique de Jana Sterback, véritable robe de viande datant de 1987 (Lady Gaga n'était qu'une enfant...) qui doit être à chaque exposition recomposée mais qui, plus de 20 ans après, a toujours le même impact.
Bref, allez-y, l'exposition est formidable, la Maison Rouge est un lieu accueillant et chaleureux : tout y est pour passer un bon moment !
Tous cannibales
La Maison Rouge
10 boulevard de la Bastille
75012 PARIS
du mercredi au dimanche, 11h00 - 19h00, le jeudi jusqu'à 21h00
Tarif plein : 7 €