Magazine Culture
Les apparences sont bien trompeuses elles nous font parfois douter pour rien. Tenez par exemple, prenez Kenny Rankin, eh bien figurez vous que malgré tout ce qu'il laisse présupposé contre lui-même — une moustache suspecte et des inflexions vocales vaguement dans le sirop — c'est un bon chanteur ! Un presque Chet Baker pop, avec un falsetto impeccable. Un interprète très à son aise dans les standards de tout acabit (Beatles, Dylan, musique brésilienne, Tin Pan Alley, jazz vocal, folk amoindri, pop centriste, soft-rock, tout ce vous voulez...) On lui doit quelques disques oscillants entre le moyen agréable et le recommandable. Celui-ci, ce Kenny Rankin album, est assez bien, il est ouvragé par Don Costa (arrangeur de quelques Sinatra moyens tardifs) et on peut dire sans aucun problème que l'humeur y est globalement moelleuse luxuriante et romantique. Kenny reprend le While My Guitar Gently Weeps de George Harrison avec des violons a little too much et une voix frôlant l'acrobatie vocale, mais sa version est quand même très bien, elle est maussade et sophistiquée tout à la fois, ce n'est pas rien... Il reprend aussi l'impeccable Groovin' des souvent impeccables Rascals, sans l'abandon ontologique de l'original, mais avec quelque chose de cristallin à la place. Il y a aussi une version de Here's That Rainy Day plus bakerienne que sinatresque et un When Sunny Gets Blue loin de Sarah Vaughan, mais pas mal quand même.
On dira que tout cela est agréable, doux et mielleux sans être trop joli, pas mal, quoi...
NB : Le meilleur de Kenny Rankin : Inside (1975), Professional Dreamer (1995)...