Mon professeur de français de cinquième nous avait demandé de rédiger un texte à la manière de Barthes. Il était un peu fou de nous parler d’un tel auteur à nous pauvres hères de 12 ans, n’empêche, ce prof m’a marquée et je n’ai jamais oublié Barthes (ni la littérature).
Ce texte c’est donc « j’aime, je n’aime pas », extrait de Roland Barthes par Roland Barthes
Celui de Barthes est à découvrir là (lu par lui même), il suffit de cliquer sur la fameuse citroen et ensuite dans la fenêtre qui s’ouvre, il faut cliquer sur la tête de Roland Barthes pour l’entendre.
Et le mien ici, bien évidemment pas écrit à 12 ans (c’était bien plus gnangnan)
« J’aime les mots, les couleurs, la musique, la douceur, les joues rebondies des enfants, avoir du temps, les voyages à l’autre bout du monde, le ronronnement de mon chat, les étoiles, le bruit des vagues, le parfum des fleurs et de l’herbe coupée, être libre, l’honnêteté, le courage, les photos en noir et blanc, Paris.
Je n’aime pas la facilité, le politiquement correct, la mièvrerie, la maladie, les fautes d’orthographe, avoir le vertige, la pluie, le froid, le temps qui passe trop vite, finir un livre trop vite, quitter ceux que j’aime, l’abêtissement du monde, l’agressivité, les cris, le mépris. »
Et comme le conclue Barthes
J’aime, je n’aime pas: cela n’a aucune importance pour personne; cela, apparemment, n’a pas de sens. Et pourtant tout cela veut dire : mon corps n’est pas le même que le vôtre. Ainsi, dans cette écume anarchique des goûts et des dégoûts, sorte de hachurage distrait, se dessine peu à peu la figure d’une énigme corporelle, appelant complicité ou irritation. Ici commence l’intimidation du corps, qui oblige l’autre à me supporter libéralement, à rester silencieux et courtois devant des jouissances ou des refus qu’il ne partage pas.
(Une mouche m’agace, je la tue : on tue ce qui vous agace. Si je n’avais pas tué la mouche, c’eût été par pur libéralisme: je suis libéral pour ne pas être un assassin.)
Roland Barthes par Roland Barthes – 1975