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La Cour franchit le Rubicon. Citoyen: la fin des situations purement internes

Publié le 08 mars 2011 par Duncan

On peut annoncé sans trop de risques de se tromper que l'affaire Zambrano (C-34/09 du 8 mars 2011) tranchée aujourd'hui va rejoindre immédiatement le panthéon des arrêts de la Cour.

Il y a en effet été décidé (après un raisonnement de seulement  10 paragraphes!) que "l’article 20 TFUE doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à ce qu’un État membre, d’une part, refuse à un ressortissant d’un État tiers, qui assume la charge de ses enfants en bas âge, citoyens de l’Union, le séjour dans l’État membre de résidence de ces derniers et dont ils ont la nationalité et, d’autre part, refuse audit ressortissant d’un État tiers un permis de travail, dans la mesure où de telles décisions priveraient lesdits enfants de la jouissance effective de l’essentiel des droits attachés au statut de citoyen de l’Union".

Autrement dit, la Cour a tout simplement mis à néant la condition d'existence d'un facteur de rattachement afin que les citoyens bénéficient des droits qu'ils tirent des articles du traité relatifs à la citoyenneté européenne (mais pas de la directive citoyen 2004/38, dont l'application demeure soumise à l'existence d'un "déplacement" inter-étatique, voir §39 de l'arrêt).

Bref, dans le débat qui opposait, à distance, les AG Sharpston et Kokott, (voir ici) la Cour a donc choisi de suivre les conclusions de l'AG Sharpston. De manière remarquable, la Cour contredit également l'ensemble des conclusions des gouvernements et de la Commission soumises dans cette affaire qui soulignaient que "les dispositions du droit de l’Union visées par la juridiction de renvoi ne seraient pas applicables dans le litige au principal" pour cause de défaut d'élément d'extranéité.

Il s'agit d'une décision importante aux conséquences nombreuses mais qui fera certainement grincer des dents. Elle va certainement entraîner, de la part des Etats membres, un durcissement des conditions d'attribution de leur nationalité afin d'éviter les déplacements de ressortissants d'Etats tiers motivés par des raisons opportunistes. Il faut d'ailleurs noter que le droit belge a déjà été modifié pour répondre aux faits de l'affaire: la nationalité belge n'est plus automatiquement attribuée aux enfants apatrides. L'article 10 du code de la nationalité a été complété. A la phrase "est Belge, l'enfant né en Belgique et qui, à un moment quelconque avant l'âge de dix-huit ans (...) serait apatride s'il n'avait cette nationalité", a été ajoutée la phrase suivante: "toutefois, l'alinéa 1er ne s'appliquera pas si l'enfant peut obtenir une autre nationalité moyennant l'accomplissement par son ou ses représentants légaux d'une démarche administrative auprès des autorités diplomatiques ou consulaires du pays de ses auteurs ou de l'un de ceux-ci" (en l'occurrence les parents, colombiens, n'avaient pas fait les démarches afin que leurs enfants obtiennent la nationalité colombienne).

Cet arrêt fera certainement l'objet de nombreux commentaires!


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