À défaut de pouvoir vous parler, pour l’instant, de Luc Tuymans, l’autre exposition au Palais des Beaux-arts de Bruxelles (jusqu’au 8 mai) ne mérite qu’un commentaire rapide. Profitant de la fermeture pour travaux des musées de Bergame et d’Anvers, Bozar présente une exposition pompeusement titrée Maîtres Vénitiens et Flamands, qui juxtapose des peintures de ‘maîtres‘, mais souvent des tableaux de second rang, et surtout sans aucune justification, ni mise en perspective, mais couvrant quatre siècles, excusez du peu. Quelles correspondances, quelles inspirations, quelles parentés ? Dans l’ensemble, il n’y a que deux ou trois tableaux qui soient inoubliables, et d’abord cette Sainte Trinité de Rubens, au raccourci saisissant, qui évoque bien sûr le Christ mort de Mantegna.
J’ai aussi aimé la Nativité de Marie, de Carpaccio, avec la précsion des scènes domestiques à l’arrière-plan dans l’enfilade des pièces. Mais sinon, rien de très passionnant et surtout la frustration d’une exposition opportuniste, manquant de sens.
La confrontation de Bellini avec Berlinde de Bruyckere n’est pas très convaincante non plus sur un plan esthétique (et elle fait frémir les visiteuses respectables), mais au moins, on voit deux belles sculptures de cette dernière, l’une (‘Pieta’) étendue sur des coussins au milieu du passage, l’autre (‘Lingam’) suspendue dans une alcôve en bois, qu’on ne découvre qu’en la contournant. Ce voyage à Bruxelles fut aussi l’occasion d’aller voir à la Verrière Hermès l’installation ‘Vibrato con Sordino’ de Charlotte Charbonnel, découverte à Jeune Création (jusqu’au 26 mars) : des cordes de diverse nature tendues depuis le centre de la pièce à partir d’une boule de cristal jusqu’aux murs produisent des sons quand on les touche, les frotte, les pince. Nylon, crin, boyau, acier, cordes d’étendage, d’accastillage, d’escalade, de pêche, tous produisent des sonorités différentes, troublantes. Ce gigantesque instrument de musique à l’échelle d’une pièce, image inversée de la verrière, ne laisse pas indifférent : chacun, négligemment, sensuellement ou professionnellement, s’efforce d’en tirer des harmonies, d’en percer le mystère. C’est une exploration de l’univers des sons qui nous est ici offerte, en contemplant le jeu des rayons de soleil sur les sinusoïdes des attaches murales des cordes et l’anamorphose dans la sphère ésotérique remplie d’eau au centre du dispositif ; c’est très mystérieux et très beau.Vibrato con sordino - Charlotte Charbonnel de charlotte charbonnel sur Vimeo.
Voyage à l’invitation de Bozar. Images courtoisie, respectivement, de Bozar et de Charlotte Charbonnel.