Présidente de l’Association Internationale des Victimes de l’Inceste, Isabelle Aubry a été élue Femme de l’année 2010 par les lecteurs de Femme Actuelle et les auditeurs de RTL
À l’occasion de la Journée internationale de la Femme, RTL et Femme Actuelle se sont unis pour proposer à leurs lecteurs et auditeurs d’élire la Femme de l’année 2010. Artistes, sportives, philosophes, chercheurs, comiques ou femmes engagées : elles étaient dix, en lice pour une seule place, et c’est Isabelle Aubry qui remporte le titre, devant Irène Frachon et Florence Foresti.
Une femme de l’ombre qui lutte contre l’inceste
Victime de son père pendant des années de 6 à 16 ans, Isabelle a décidé de consacrer sa vie aux autres victimes qui, comme elle, ont un jour subi l’inceste. Elle fonde, en 2000, l’Association Internationale des Victimes de l’Inceste, pour qu’enfin, la parole des victimes soit entendue et que l’État se préoccupe de leur santé. Actuellement, 2 millions de personnes (sondage Ipsos) sont touchées par l’inceste en France. Mais les choses ne sont pas simples. Tabou, l’inceste dérange, il touche à la famille, un cocon censé protéger, pas agresser. Début 2010, Isabelle réussit à faire inscrire le mot « inceste » dans le Code pénal. Une petite victoire, car autrefois, l’ascendant familial ayant mené à contraindre l’enfant n’était pas clairement défini. Pour que le viol soit qualifié, il doit y avoir « menace, contrainte ou surprise », et la victime doit avoir dit « non », ce qui est très rarement le cas d’un enfant abusé au sein même de sa famille. La notion de contrainte a été introduite dans la loi pour « en finir avec cette histoire de consentement de l’enfant », explique Isabelle.
Ce qu’elle veut changer
Aujourd’hui, si son premier combat a été remporté, Isabelle interpelle directement le Ministre de la santé, Xavier Bertrand, pour qu’il fasse enfin voter le deuxième volet de la loi, qui prévoit la création de centres de soins spécialisés pour accueillir les victimes, le développement de la prévention et la formation des professionnels. Les groupes de parole créés par l’association sont libérateurs pour les victimes qui peuvent témoigner, mais ne soignent pas pour autant. Pourtant, les conséquences de l’inceste sont nombreuses et dévastatrices : anorexie, boulimie, tentatives de suicide, alcoolisme, toxicomanie… Le traumatisme est bien là. Isabelle estime que ce n’est pas à l’association de prendre en charge les « survivants de l’inceste », mais à l’État. Celui-ci qui doit prendre ses responsabilités et ouvrir les yeux sur ce véritable problème de société. Forte de ce prix, Isabelle compte bien frapper de nouveau à la porte des politiques, pour qu’enfin, l’inceste sorte de l’ombre.
Retrouvez notre interview d’Isabelle Aubry et son passage dans le JT des Assos.
Lauren Clerc