Il est toujours étonnant de lire ou entendre que les marques font face à un nouvel enjeu qu’elles ont pourtant très bien résolu il y a plus de 70 ans. Le brand content – ou branded content ou encore brand entertainement- serait ainsi une nouvelle exigence imposée par le net aux marques qui doivent offrir à leur public des contenus divertissants, sans mise en avant systématique des produits. Un bouleversement pour les marketeurs du monde entier qui feraient face à l’une des plus grandes mutations d’un monde publicitaire qui ne séduit plus en format 30 secondes et bannière.
Pourtant, ces mêmes marketeurs ont tous appris à l’école ce que les lessiviers ont inventé entre les deux guerres pour réunir et rendre captif leurs consommateurs autour de “nouveaux” médias. Avec une agilité qui leur a permis de fidéliser un public de plusieurs millions de femmes au foyer – leur coeur de cible – pendant des décennies.
Le 13 septembre 2010, un événement gigantesque est pourtant passé quasiment inaperçu dans la communauté marketing : P&G Productions annonçait la fin de As the world turns et en profitait pour saluer “une série qui a divertit le public aux US et à travers le monde tout en offrant une plateforme idéale pour passer ses messages”. Difficile de faire plus clair. Un événement important puisqu’il s’agissait de la dernière production encore diffusée (sur CBS) après plus d’une cinquantaine de séries proposées par la filiale entertainment de la multinationale. Regardez le tribute qui rappelle le rôle prépondérant joué par le feuilleton dans la société américaine (et les quelques stars qui y ont débuté).
Un an plus tôt, le 11 août 2009, l’arrêt d’une autre série aurait du marquer les esprits : Guiding Light, crédité au livre des records pour sa longévité, s’arrêtait après 72 ans de bons et loyaux services. Après un parcours dont très peu se souviennent : lancé à la radio sur NBC Radio en format 15 minutes le 25 janvier 1937, la diffusion en télé a débuté sur CBS en juin 1957 avant de passer en format 30 minutes en 1968 puis 1 heure en 1977. Guiding Light a été partiellement diffusé en France de façon chaotique et sans grand succès sous le titre Haine et passion sur TF1 puis Les vertiges de la passion sur France 3. Avant de disparaitre de toutes les antennes pour cause d’érosion d’audience.
Les soap opéras, dont le nom trahit l’origine mercantile, ont envahi par la suite toutes les heures de la journée (Dallas a ouvert le bal en soirée en 1978) et toutes les tranches d’âges (Berverly Hills s’adressant aux ados). Les diffuseurs ont tellement assumé le format qu’elles l’ont produit elles-mêmes, s’affranchissant des lessiviers producteurs pour leur offrir du “temps de cerveau disponible”.
Le brand content est né le 25 janvier 1937 avec les soap opéras, il va falloir que les marketeurs des grands lessiviers trouvent la relève à inventer sur le web.