Pour tout le monde en fait. Vers 3h30 du matin samedi, on me téléphone. Une collègue canadienne est prise d’une tourista trop intense selon l’armada médical du projet. En ces temps de choléra, l’alerte se sonne, peu importe l’heure. Plus de peur que mal, mais une bonne frousse. Le départ pour la République Dominicain est donc décalé de quelques heures. On prévoit ce grand voyage depuis des mois. Pour Claudette en fait. Quelques semaines après le tremblement de terre, son fils a été malade. Le frère de Claudette qui vit en République Dominicaine passait voir la famille à PAP, ils ont décidé qu’il ramenait le timoun avec lui pour le faire soigner. Depuis près d’un an donc, Prony vit à Santo Domingo avec son oncle. Des enfants qui vivent chez l’oncle ou la tante, c’est tout à fait conforme à la vision haïtienne de de la famille. Depuis l’automne, Jo planifie ce voyage avec Claudette. Je dis planifie dans la mesure où si j’avais le temps de vous détailler toutes les étapes qu’une haïtienne du rang social de Claudette doit déployer pour obtenir un passeport, vous me proposeriez d’installer MSProject sur mon ordinateur... Toutes ces étapes dans le fouillis administratif d’Ayiti et dans la mauvaise foi que ses fonctionnaires sont capables de déployer, je vous le dis, ça mérite un Nobel. Depuis septembre donc, Claudette et Jo se sont empêtrées dans des démarches administratives pas possible pour que Claudette puisse enfin mettre la main sur son passeport à la fin du mois de janvier. 24 heures plus tard, la République Dominicaine lui délivrait un visas. Il ne restait maintenant qu’à permettre à Claudette de prendre la route vers Santo-Domingo. On fait toutes les démarches pour le billet de bus de Claudette pendant qu’on tente de préciser le lieu de rendez-vous avec Roni, le frère qui s’occupe du petit depuis un an. Depuis les années, son créole s’est effrité. Pas facile de bien se comprendre au téléphone. Est-ce qu’il y a un ou des terminus ? Lequel ? Ce serait préférable qu’elle descende sur la route ? Où ? Comment elle le saura ? Un flou anxiogène pour Claudette qui n’a jamais voyagé et qui ne parle pas espagnol. Anxiogène itou pour nous. Tout ça dans un contexte où les relations entre les ayisien et les dominicains sont au beau fixe... On a donc décidé de venir passer un long week-end à Santo-Domingo et de donner une roulib (une roue libre, un ‘lift’ en québécois ...) à Claudette. Vendredi, la journée avant le départ, elle s’est fait faire une beauté. La totale. Dans la voiture, elle a tenu un silence de six heures. Sa peau noire nous empêchait de constater qu’elle était rouge d’anxiété. On le sentait. ‘T’es anxieuse Claudette ?’ ‘Nonnnn.’ ‘Oh, un ti menti...’ Elle a sourit. Arrivée à Santo-Domingo, on trouve facilement le lieu de rendez-vous. Le frère n’y est pas. Pour nous aider, une jolie républicaine enceinte lui téléphone et lui indique où nous sommes. Ne trouve pas, rappelle notre sauveuse. Ne trouve pas plus. Le manège téléphonique durera près d’une heure. Claudette n’en peut plus. Nous, on est sur le bord... Notre sauveuse qui avait d’autre chose à faire lui a demandé de ne plus bouger et nous a amenés le rejoindre. Cinq minutes à pied... Le frère a peut-être perdu le créole, pas mais pas cette habitude haïtienne de donner des indications qui évitent les précisions. Je pense qu’il était le plus heureux des retrouvailles. Le petit n’était pas encore là, pas de place pour lui, le frère se promenant en moto, pensait ramener Claudette et sa valise. On a repris la voiture et l’avons suivi jusque chez lui, nous aussi on voulait retrouver Prony. Elle qui avait été silencieuse durant tout le trajet s’installera le menton entre nos deux sièges pour parler sans arrêt jusqu’aux embrassades avec son fils. De rues en ruelles, on a abouti dans un quartier populaire de Santo-Domingo, probablement aussi animé que tous les quartiers défavorisés de Santo-Domingo. De la musique, de la bière, des femmes qui se font belles (avec des bigoudis pour se défriser les cheveux), des bonhommes qui jouent aux cartes, des enfants qui jouent. Tout ça se vit dehors bien évidement. Prony sera fou de joie de voir sa mère. Ils passeront sûrement une semaine de rêve. Nous, il nous fallait sortir de ce labyrinthe et trouver l’hôtel. Embouteillages de fin de journée du samedi, il est presque 19:00 quand on déposera les valises dans le lobby de l’hôtel. Vers 20:00, on reprendra la voiture pour migrer vers un autre hôtel... Plus de place pour nous, du ‘fuckage de chien’ comme les hôteliers un peu véreux de la République-Dominicaine peuvent en faire. Vers 22:00, on déposera nos fesses sur une terrasse pour prendre une bière et manger un pizza. Claudette ? Elle dort sûrement.
Pour tout le monde en fait. Vers 3h30 du matin samedi, on me téléphone. Une collègue canadienne est prise d’une tourista trop intense selon l’armada médical du projet. En ces temps de choléra, l’alerte se sonne, peu importe l’heure. Plus de peur que mal, mais une bonne frousse. Le départ pour la République Dominicain est donc décalé de quelques heures. On prévoit ce grand voyage depuis des mois. Pour Claudette en fait. Quelques semaines après le tremblement de terre, son fils a été malade. Le frère de Claudette qui vit en République Dominicaine passait voir la famille à PAP, ils ont décidé qu’il ramenait le timoun avec lui pour le faire soigner. Depuis près d’un an donc, Prony vit à Santo Domingo avec son oncle. Des enfants qui vivent chez l’oncle ou la tante, c’est tout à fait conforme à la vision haïtienne de de la famille. Depuis l’automne, Jo planifie ce voyage avec Claudette. Je dis planifie dans la mesure où si j’avais le temps de vous détailler toutes les étapes qu’une haïtienne du rang social de Claudette doit déployer pour obtenir un passeport, vous me proposeriez d’installer MSProject sur mon ordinateur... Toutes ces étapes dans le fouillis administratif d’Ayiti et dans la mauvaise foi que ses fonctionnaires sont capables de déployer, je vous le dis, ça mérite un Nobel. Depuis septembre donc, Claudette et Jo se sont empêtrées dans des démarches administratives pas possible pour que Claudette puisse enfin mettre la main sur son passeport à la fin du mois de janvier. 24 heures plus tard, la République Dominicaine lui délivrait un visas. Il ne restait maintenant qu’à permettre à Claudette de prendre la route vers Santo-Domingo. On fait toutes les démarches pour le billet de bus de Claudette pendant qu’on tente de préciser le lieu de rendez-vous avec Roni, le frère qui s’occupe du petit depuis un an. Depuis les années, son créole s’est effrité. Pas facile de bien se comprendre au téléphone. Est-ce qu’il y a un ou des terminus ? Lequel ? Ce serait préférable qu’elle descende sur la route ? Où ? Comment elle le saura ? Un flou anxiogène pour Claudette qui n’a jamais voyagé et qui ne parle pas espagnol. Anxiogène itou pour nous. Tout ça dans un contexte où les relations entre les ayisien et les dominicains sont au beau fixe... On a donc décidé de venir passer un long week-end à Santo-Domingo et de donner une roulib (une roue libre, un ‘lift’ en québécois ...) à Claudette. Vendredi, la journée avant le départ, elle s’est fait faire une beauté. La totale. Dans la voiture, elle a tenu un silence de six heures. Sa peau noire nous empêchait de constater qu’elle était rouge d’anxiété. On le sentait. ‘T’es anxieuse Claudette ?’ ‘Nonnnn.’ ‘Oh, un ti menti...’ Elle a sourit. Arrivée à Santo-Domingo, on trouve facilement le lieu de rendez-vous. Le frère n’y est pas. Pour nous aider, une jolie républicaine enceinte lui téléphone et lui indique où nous sommes. Ne trouve pas, rappelle notre sauveuse. Ne trouve pas plus. Le manège téléphonique durera près d’une heure. Claudette n’en peut plus. Nous, on est sur le bord... Notre sauveuse qui avait d’autre chose à faire lui a demandé de ne plus bouger et nous a amenés le rejoindre. Cinq minutes à pied... Le frère a peut-être perdu le créole, pas mais pas cette habitude haïtienne de donner des indications qui évitent les précisions. Je pense qu’il était le plus heureux des retrouvailles. Le petit n’était pas encore là, pas de place pour lui, le frère se promenant en moto, pensait ramener Claudette et sa valise. On a repris la voiture et l’avons suivi jusque chez lui, nous aussi on voulait retrouver Prony. Elle qui avait été silencieuse durant tout le trajet s’installera le menton entre nos deux sièges pour parler sans arrêt jusqu’aux embrassades avec son fils. De rues en ruelles, on a abouti dans un quartier populaire de Santo-Domingo, probablement aussi animé que tous les quartiers défavorisés de Santo-Domingo. De la musique, de la bière, des femmes qui se font belles (avec des bigoudis pour se défriser les cheveux), des bonhommes qui jouent aux cartes, des enfants qui jouent. Tout ça se vit dehors bien évidement. Prony sera fou de joie de voir sa mère. Ils passeront sûrement une semaine de rêve. Nous, il nous fallait sortir de ce labyrinthe et trouver l’hôtel. Embouteillages de fin de journée du samedi, il est presque 19:00 quand on déposera les valises dans le lobby de l’hôtel. Vers 20:00, on reprendra la voiture pour migrer vers un autre hôtel... Plus de place pour nous, du ‘fuckage de chien’ comme les hôteliers un peu véreux de la République-Dominicaine peuvent en faire. Vers 22:00, on déposera nos fesses sur une terrasse pour prendre une bière et manger un pizza. Claudette ? Elle dort sûrement.