Port de Venise, été 1890. Le Namouna, splendide yacht du richissime homme d’affaire James Gordon Bennett Jr, jette l’ancre pour y passer l’été. A son bord, une vache. Une splendide vache venant de Suisse.
Giudecca, été 1890. Frederick Eden, propriétaire depuis six ans d’un immense jardin sur la grand île qui souligne les Zaterre, se plaint régulièrement du lait frelaté qui encombre les étals de la Sérénissime: l’eau et la farine n’ont pas leur place dans un pot à lait!
La vache du Namouna est à vendre. Eden l’achète. Il la rebaptise … Namouna.
Les mamelles de la plantureuse Suissesse s’étiolent bien vite sans la compagniede ses anciens loups de mer. Rien n’y fait, pas même les appétissants choux et les rames de poisqui relèvent son fourrage..
Quatorze vaches, des italiennes et autrichiennes, traversent bientôt les eaux de la lagune pour rejoinder Namouna. Les unes donnent beaucoup de lait, les autres beaucoup de crème.
Les quinze pensionnaires de Frederick et Caroline Eden ne furent pas les seules à meugler à Venise. Toujours à la Giudecca, derrière le Mulino Stucky, de nombreuses étables hébergèrent près de cent cinquante laitières avant que la guerre et les frères Michele et Salvatore Scalera ne les transforment en studio de cinéma. Mais c’est une autre histoire …
Un jardin à Venise, Frederick Eden