Magazine Cinéma
Attention ovni. Il fallait bien les gueules de Benjamin Biolay et de Yolande Moreau pour ressusciter les rednecks de l’Amérique profonde en pleine cambrousse nordique. Décor industriel minier et désolation du paysage belge en toile de fond d’un nouveau film de genre français qui suit la descente aux enfers de Charlotte (Emilie Duquenne) dans une ferme paumée en plein no man’s land terreux. Elle aime le métal, arbore les lettres HATE sur ses phalanges, se fait emmerder par des motards dégénérés, prend en stop le mauvais mec- sur la mauvaise route. Un Highway to hell furibard, paumé à mi-chemin entre un vieux Carpenter et un moderne Hostel. Ses influences, Franck Richard les connaît sur le bout des doigts, en use et en abuse, à l’heure où ce type de longs-métrages poussent comme des mauvaises herbes. Si Laurent Bares, directeur de la photographie, réalise un travail soigné et admirable (l’atout numéro un du film)- bien plus réaliste que sur Frontière(s) de Gens, le scénario est loin derrière, traînant la patte comme un zombie fatigué. Le cinéaste bâcle son histoire, se perd dans de l’humour vulgaire, dispensable, couleur tourbe. Le massacre n’étant plus suffisant en lui-même, la déception est de taille. D’autant plus que l’ensemble est parsemé de bonnes trouvailles : l’inquiétant Philippe Nahon (Haute Tension, Calvaire) dans un rôle à contre-emploi (!), les golems cannibales ultra crédibles, les répliques cultes lancées par l’insolente Moreau. La voir, au crépuscule, trôner sur une charrette tirée par un cheval, ou ricaner furieusement à la gueule de la mort suffit au grand frisson. Pour le reste, et malgré de réelles promesses dans le style (une pointe de fantastique, une pincée de gothique, et des litres d’hémoglobine), la belle coquille sonne creux.