Voici qu’une nouvelle « votation » a conduit les Suisses à refuser une proposition présentée par le Conseil fédéral à la demande de plusieurs associations et formations politiques : il s’agissait de renoncer à garder des armes de guerre à domicile. Les Suisses sont récidivistes : en un an ils ont rejeté la construction de minarets, puis ils ont demandé l’expulsion immédiate des étrangers délinquants.
Aux États-Unis les citoyens, du moins dans certains États, sont libres de posséder et d’utiliser des armes à feu, dans des conditions en général précises. En Suisse les armes sont à usage purement militaire : en cas de conflit armé, ou de simples manœuvres, les citoyens-soldats sont immédiatement mobilisés et se rendent au poste qui leur a été assigné avec l’arme qu’ils gardent et entretiennent à la maison. Pour autant l’armée suisse n’est pas une armée d’opérette, on dit qu’Hitler n’a pas voulu s’y frotter car il aurait dû mobiliser plusieurs divisions.
Mais, en dehors de cette face militaire, il y a chez les Suisses une volonté inébranlable de ne pas s’en laisser compter. À tort ou à raison, ils refusent de suivre des modes qui leur paraissent contraires à leur sens très poussé de la démocratie. Ils ne confient à aucun parlement, aucune autorité publique, aucun média, le soin de régler les affaires communes, ils veulent être consultés, ou provoquer des consultations. Cette démocratie directe, référendaire, peut passer pour une rémanence médiévale, mais elle peut aussi servir de modèle démocratique.
La votation a été rejetée par 56% des votants, eux-mêmes 50% de la population. Les votes ont été très différents entre cantons francophones (Genève, Vaud, Jura) et les cantons alémaniques. C’est dire que le fédéralisme est aussi une réalité dans ce pays. La Suisse n’est pas une réserve d’indiens, ce serait plutôt un pôle d’excellence démocratique. À nos yeux les Suisses ne sont pas des demeurés, mais des fidèles : nuance.