Angele et tony

d'Alix Delaporte
Drame - 1h30Sortie salles France - 26 janvier 2011
avec Clotilde Hesme, Grégory Gadebois, Evelyne Didi, Patrick Descamps, Jerôme Huguet, Antoine Couleau...Prix d'Ornano du Meilleur 1e film Français

Elle est complètement déboussolée, cette Angèle, la vingtaine, qui fait n'importe quoi de son corps pour qu'importe combien. Le regard dur, les répliques agressives, elle cache une douleur, des années passées en prison, une vie au foyer pendant sa conditionnelle. Et puis un fils vivant chez ses beaux-parents, fils qu'elle n'a pas vu depuis une éternité. Elle débarque un jour dans le coin de Port-en-Bessin, Calavados, pour une rencontre de petite annonce. Elle voudrait trouver un mari, se caser. Surtout pour que la juge lui accorde peut-être la garde de son fils. Tony, pêcheur de Port-en-Bessin, homme affecté de la mort récente de son père, se méfie comme de la peste de cette fille qui lui saute dessus, s'incruste chez sa mère, lui parle peu et répond mal. Il faut un travail à Angèle, alors ce sera au port à aider la mère de Tony. D'abord avec une mauvaise volonté, elle se pliera au travail en cherchant à se créer une place dans cette famille, la place d'une épouse peut-être...

Quelle chance j'ai eu de pouvoir profiter de cette séance de rattrapage pour un film sorti il y a plus d'un mois. Quelle chance de voir à l'écran des personnages touchants, qui vous tirent même contre votre plein gré des larmes de tendresse. Toute cette tension est remarquablement portée d'un bout à l'autre du film par le visage dur d'Angèle jouée par la belle Clotilde Hesme. Une fille sauvage, insondable, violente, effarouchée par les questions personnelles. Une vraie tête à claque, une peste que des remerciements pour l'accueil de la mère de Tony écorcheraient la bouche. Et pourtant, Tony la laisse faire, sans lui poser plus de questions voyant que c'est inutile. Il n'est pas dupe, elle ne s'est pas installée pour lui, mais parce que d'une manière ou d'une autre, ça l'arrange elle. Et cette confiance que lui fait Tony est un comportement rare que le film sublime : il n'a pas besoin d'être rassuré ou inquiété sur son passé, il attend de voir comment cet oiseau écorché vif fera son nid ici, comment Angèle gagnera l'estime de l'entourage.

Et sur le visage de prison d'Angèle, quand un sourire apparaît, c'est tout le poids des tensions qui peut s'envoler - incroyable comme l'image s'éclaire quand enfin elle se déride. Pas besoin de plus pour que Tony garde espoir, même s'il ne s'agit pas de démarrer une romance et de partager le même lit. Les deux se cherchent, Tony cherche à apprivoiser Angèle, Angèle cherche à faire ses preuves auprès de Tony, auprès de sa famille, auprès de ses beaux-parents et de son fils, taiseux comme elle.Ce film est comme une chorégraphie pudique d'êtres qui se cherchent, s'observent, s'affrontent, s'amadouent, et s'aiment malgré eux. Des vies difficiles, un milieu pas forcément tendre, mais un film franchement bien tourné, bien pensé, truffé de scènes remarquablement belles et inattendues et qui évite une lourdeur inutile. Un très grand premier film !L'avis de BMR et/ou MAM - BMR-MAML'avis de Yohan - Le blog de YohanL'avis de Kilucru - Les Irréductibles