Rencontre Philosophie Assises de L'Humanité
Sociologue, historien, philosophe, Edgar Morin pense le changement à l’heure de la globalisation. Son livre qui vient de paraître chez Fayard, au titre explicite, la Voie, explore des pistes nouvelles en tirant les leçons des échecs du siècle dernier. Il sera demain le premier invité de l’université populaire de l’Humanité.
Par la noirceur du diagnostic qu’elle propose du cours actuel de notre société, par son pronostic abrupt, par la hauteur de la tâche à laquelle elle nous confronte, ne pensez-vous pas que votre voie soit susceptible de désespérer ? Et notamment les jeunes générations ?
Edgar Morin. Certains lecteurs trouvent mon livre optimiste et d’autres pessimiste parce j’unis la perspective pessimiste et probable d’événements qui nous conduisent vers des catastrophes à l’idée que c’est dans la prise de conscience des désastres dans lesquels nous allons qu’il y aura une réaction qui pourra nous donner un chemin, une voie. Dans mon livre, je montre qu’il y a partout dans le monde et quel que soit le domaine des initiatives créatrices de futurs. Malheureusement, elles sont dispersées, elles ne se connaissent pas les unes les autres.
Si, maintenant, vous voyez des jeunes d’aujourd’hui qui sont en plein désarroi alors, évidemment, on peut me dire que, si je leur montre que la situation s’aggrave, cela accroît leur désorientation. Mais je leur montre aussi que, peut-être, il y a la voie de la résistance et du changement. Qu’il y a une cause qui est la plus grande qui ait jamais existé dans l’histoire et qui est celle où le salut de l’humanité et sa survie sont liés à une transformation radicale, la métamorphose. Cela peut donner un élan.
Parlons de la Résistance. Jusqu’à la fin de 1941, ce qui semblait hautement probable, c’était la victoire de l’Allemagne nazie. Beaucoup de ceux qui se sont engagés dans le combat pour la libération nationale l’ont fait dans une sorte d’élan et sans être sûrs qu’ils allaient aboutir. Notre cause, à l’époque, qui était très belle, ce n’était pas seulement la libération de la France mais, pour moi qui étais communiste, c’était aussi le salut de l’humanité. Mais à l’époque on ne voyait pas deux choses. Premièrement que la France libérée allait redevenir colonialiste et que les massacres de Sétif coïncideraient avec la victoire sur le nazisme et, deuxièmement, que l’Union soviétique allait s’enfoncer pendant longtemps dans le stalinisme. Aujourd’hui, il n’y a plus cette équivoque.
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