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Il y a 20 ans, Rodney King et « l’ancien LAPD »

Publié le 04 mars 2011 par Ifiwasinla

Il y a 20 ans, Rodney King et « l’ancien LAPD »

Il y a très précisément 20 ans, le 3 mars 1991, Rodney King, arrêté pour excès de vitesse, en état d’ébriété, se montre agressif face aux agents du LAPD. Ces derniers le tabassent à coups de matraque, enregistrés à leur insu par le caméscope d’un voisin. La vidéo est diffusée le soir même à la télévision.

L’affaire est fortement médiatisée. La vidéo est visionnée des centaines de fois par le jury lors du procès des agents, à tel point qu’ils la vident de toute émotion, la considèrent comme un objet mécanique. Des débats se tiennent sur la question des cris de Rodney King : hurle-t-il de douleur ou profère-t-il des injures ?

Le 29 avril 1992, les policiers sont déclarés non coupables par la Cour de Los Angeles. La colère de la population provoque cinq jours d’émeutes, qui marquent profondément a ville. Une soixantaine de morts, plusieurs milliers de blessés et de bâtiments incendiés. Mark, habitant de Los Angeles que j’ai interrogé en début d’année, dit s’être réfugié chez un ami à Beverly Hills :

«I sat on the balcony of my friend’s apartment, watching Downtown burn.»

En ce vingtième anniversaire, le chef de la police a déclaré que :

«le LAPD a depuis subi des changements significatifs, mais ce n’est pas seulement le LAPD, c’est aussi la ville toute entière.»

Néanmoins, le problème venait à l’époque en grande partie du LAPD, comme en témoignent de nombreuses personnes interrogées par Anna Deavere Smith pour sa pièce de théâtre «socio-journalistique» Twilight: Los Angeles, 1992.

C’est le cas de Michael Zinzun, figure éminente de la lutte contre les violences policières après s’être fait éborgner en s’interposant dans un tabassage en règle. Ou encore de Theresa Allison, dont le fils eut le malheur de se faire interpeller de nuit dans une rue déserte. Son corps fut retrouvé dans un quartier voisin, criblé des balles d’un gang ennemi ; tous les éléments portant à penser que la police l’y avait sciemment déposé.

L’autre côté est aussi représenté dans ces interviews. Il y a cet anonyme, juré dans le premier procès de Rodney King (il y en eut un deuxième, condamnant deux policiers sur quatre), à la fois convaincu en toute bonne foi de l’innocence des policiers, et tétanisé par la tournure des événements. Pendant les émeutes, sa famille est menacée ; il n’ose plus sortir de chez lui.

Le sergent Charles Duke critique la façon dont l’un des policiers tient sa matraque. Il le juge «inefficace», et s’étonne qu’on l’ait laissé «aller sur le terrain» malgré son inefficacité.

Elle est longue, l’histoire de ces émeutes. C’est un chapelet d’incidents semblables à celui de Rodney King, parfois plus graves, celui-là ne restant que l’élément déclencheur. Aussi long est le deuil : la plupart des habitants de Los Angeles aujourd’hui ont vécu ces émeutes, et le sujet reste sensible. Soit, les choses ont évolué pour la communauté noire-américaine.

Mais pour d’autres, bien qu’un peu moins violemment discriminés à l’origine, rien n’a changé. C’est le cas, par exemple, de la communauté Coréenne, à partir de laquelle Anna Deavere Smith a réalisé l’un de ses monologues les plus poignants — authentique, comme toujours (voir la vidéo, en anglais).



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