Que manque-t-il au XV de France pour retrouver le lustre que son attaque a perdu depuis plusieurs années ?
La question est complexe, car elle repose en bonne part sur le mythe du French Flair, dont on rappellera qu'il fut inventé par un Anglais, et donc qu'il est sujet à caution (NDRL : humour).
Force est de constater que les lignes arrières tricolores ne produisent plus vraiment d'offensives dignes de ce nom, et rares sont les essais inscrits par le XV de France sur des actions construites ou même des initiatives individuelles soutenues par des replacements adaptés de coéquipiers faisant vivre le ballon jusqu'à la ligne d'en-but adverse.Foin d'une nostalgie d'une époque révolue. Il convient simplement de reconnaître que nos attaquants sont globalemet en deçà des exigences du jeu moderne.
Le rugby d'aujourd'hui exige à la fois une technique individuelle pointue (appuis, lecture du jeu et des intervalles, passe après contact, jeu au pied...) et une approche collective parfaitement huilée.
Sur le premier point, les spécialistes Français ont très largement mis l'accent sur le déficit qui existe dans la formation des joueurs dans certains domaines. Au niveau professionnel, les ateliers de "skills" (qu'on peut traduire par « Aptitudes techniques ») sont assez nouveaux alors que les meilleures nations du sud les pratiquent de longue date, en faisant au besoin appel à des compétences empruntées à d'autres disciplines sportives.
Sur le second point, qui concerne la cohérence collective, on en revient à la sempiternelle problématique du calendrier et des plages réservées à l'équipe de France pour se préparer. Quand vous disposez de quelques jours disséminés de-ci de-là pour vous entraîner, vous ne pouvez espérer développer des automatismes à l'image de ce qui se pratique dans des équipes dont les joueurs se côtoient plusieurs mois dans l'année.
On rétorquera que la phase de préparation pré-coupe du monde nivelle (vers le haut) le niveau des équipes. Certes, mais elle ne remplace pas les automatismes patiemment créés et, surtout, rodés pendant les compétitions régionales (Tournoi, Tri-Nations) et les tests matchs.
A moins d'accepter (comme le font les clubs Anglais) une accumulation de doublons et/ou de journées de championnat disputées sans les internationaux, l'avenir de l'Equipe de France passe vraisemblablement par un resserrement de l'élite. Mais cela doit s'accompagner d'une politique volontariste pour que les échelons immédiatement inférieurs (Prod2 et Fédérale 1) jouent leur rôle de "réserve" de l'élite et de marchepied vers le haut niveau pour les jeunes.On peut avancer que la réforme de la fédérale 1 entreprise par la FFR (pas forcément pour des motifs purement sportifs) va dans ce sens. Mais cela exige de douloureux sacrifices pour des clubs et leurs supporters, en particulier ceux qui vont subir un "déclassement", au moins apparent. Par ailleurs, la tentation est grande de présenter la situation du rugby hexagonal à celle du football Anglais : grand championnat, petite équipe nationale. On ne peut nier que le nombre important de joueurs étrangers a nécessairement un impact sur le temps de jeu accordé aux éléments prometteurs, mais la fréquentations des meilleurs tire le niveau vers le haut. Tout est affaire de dosage. A l'heure actuelle, on peut trouver celui-ci un peu déséquilibré.
Enfin, pour ouvrir un peu plus le débat, on terminera ce point de vue quelque peu "systémique" par une dernière question : avec une attaque Trinh-Duc (10), Mermoz (12), Fritz (13), Clerc (11) Andreu (14), Médard (15), serait-on loin du compte en termes de "jeu à la Française" ?
C'est un exemple, mais, au fond, la valeur d'une attaque dépend avant tout de ceux qui la composen. Lapalice n'aurait sans doute pas dit mieux.
Et Marc Lièvremont ?