La ville de Milan a enfin son musée d’art contemporain!
Le Museo del Novecento, qui a cartonné pendant les vacances de Noël, a été longtemps attendu par les milanais qui pourtant habitent une ville riche en art et protagonistes des avant-gardes du début du Xxème siècle jusqu’aux années 1970. Jusqu'au 2010, au-delà des galeries, il fallait se contenter du Musée de la Triennale et des expositions temporaires au Palazzo Reale (la plupart décevantes) et au Padiglione d'Arte Contemporanea (qui a connu auparavant une programmation plus intéressante).
Je ne pouvais donc pas manquer de visiter ce musée et de vous en parler sur ces pages.
D'abord un petit mot sur l’aménagement : le parcours du musée est vraiment difficile à suivre, si vous n'avez pas une bonne boussole et/ou un bon sens de l'orientation.
On admire d’abord les tableaux des Futuristes (n'oubliez pas que le centre de rayonnement du Futurisme était la ville de Milan et qu'ici résidaient Umberto Boccioni, Filippo Tommaso Marinetti et Carlo Carrà) de la collection Jucker (une famille très riche d’entrepreneurs d’origine suisse dont la collection a été achetée très cher par la Ville de Milan dans les années 1990). Puis, c’est le tour des chefs-d’œuvre des années 1950, une autre époque très importante pour cette ville, qui était au centre des questionnements artistiques en Europe : le Nouveau Realisme s’était developpé entre Nice, Paris et Milan et ici travaillait l’artiste Piero Manzoni. N’oublions pas non plus Lucio Fontana, dont on va parler plus tard, Renato Guttuso avec la peinture réaliste et bien sûr Mario Sironi avec ses tableaux mélancoliques qui représentent la ville à la fin de la guerre. Je vous laisse imaginer la foule face à ces chefs-d’œuvre qu’on nous apprend dans tous les livres d’histoire de l’art depuis notre plus jeune âge.
C’est après un dédale de couloirs, escaliers et salles qu’on tombe sur une petite, mais très intéressante, aile consacrée aux années 1960-70. Les premières salles abritent des installations appelées « Ambienti » (environnements) conçues par des artistes de la fin des années 1950 qui montrent très bien d'où viennent les installations d'aujourd'hui : lumières stroboscopiques et parcours au milieu de miroirs où perception et divertissements s'entrêmelent.
Puis j'ai eu le plaisir de voir ici réunis des chefs d'oeuvre du courant Arte Povera que je ne pensais trouver à Milan. Vous devez savoir que ce courant des années 1960-1970 a son centre de diffusion à Turin, la ville où Michelangelo Pistoletto, Giulio Paolini, Alighiero Boetti, Giuseppe Penone, Mario Merz habitaient et exposaient. Je ne vous dévoilerai pas ici ce qu’est l'Arte Povera (ce sera le sujet d'un autre post), mais je vous dirai que j'ai particulièrement apprécié une installation très élégante et poétique de Pier Paolo Calzolari, composée d’un serpentin en cuivre couvert partiellement de givre, un tube au néon et feuilles de tabac (mais je n'ai malheureusement pas de photo).
Si vous y arrivez en parcourant les méandres de ce musée, ne ratez pas non plus la dernière salle qui s'ouvre, avec des énormes vitraux, sur la place du Duomo: en plus de la superbe vue, vous pourrez admirer une installation très célébre de Lucio Fontana de 1970 et a été recrée en accord avec la Fondazione Lucio Fontana. Il s’agit d’un tube au néon qui forme une arabesque moderne sur le plafond de la salle et complète les fameux tableaux avec les coupes (il y en a 3 dans cette même salle, pour moi c'était la première fois, et je vous assure que ne serait-ce que pour ces tableaux, ce musée vaudrait le déplacement!). Fontana était au centre du renouvellement des arts dans les années 1950 à Milan et c’est ici qu’il publie en 1947 son premier Manifesto Spatialiste. Avec cette sculpture qui habite si bien l'espace, toutes ses réflections artistiques et théoriques sont très bien illustrées.
En essayant de trouver la sortie, je me disais qu’on est enfin très heureux de pouvoir se vanter d'un musée d'art contemporain digne de l’histoire de cette ville! (et pas seulement des ses magasins de chaussures !)