Comment ridiculiser l’Etat en trois minutes

Publié le 03 mars 2011 par Copeau @Contrepoints

Plusieurs lecteurs et mon habituelle promenade sur wikio.fr m’ont alerté sur une des dernières idioties, calibre Andouille Quintuple A, pondues par les yaourts nature et sans bifidus qui nous gouvernent : un décret du 1er mars fait rentrer en application la loi de 2004 imposant la conservation d’une brochette de données personnelles par les fournisseurs d’accès internet… La lecture du décret ne laisse aucun doute sur les deux adjectifs qui collent le mieux à ceux qui ont eu l’idée aussi sotte que grenue de pondre un texte pareil : idiots et contre-productifs.

Et pour prouver que nos élites le sont dans le seul domaine de la bêtise affligeante, je vous propose de ridiculiser l’état en quelques clics et trois minutes.

Trois minutes pour rendre une loi complètement inopérante, rouler les nigauds qui s’imaginent encore pouvoir fouiller dans votre vie privée sans vergogne, pour faire comprendre que non, l’état n’a pas, sous aucun prétexte, à fouiller dans vos correspondances, c’est très peu. Et comme c’est 100% efficace, c’est trois minutes fort bien dépensées.

Première minute

On se rendra par exemple sur ce petit article fort bien fait de Korben. Il traite des VPN, ou réseaux privés virtuels.

Hors jargon, cela veut simplement dire que les opérateurs proposés sur dans le billet permettent d’installer un petit logiciel qui va crypter de bout en bout votre connexion jusqu’à des serveurs qui vous relient au reste d’internet. Votre fournisseur ne voit qu’un paquet d’octets indéchiffrables. Quant au fournisseur de service VPN, vous en prendrez un sur un territoire un chouilla plus respectueux des libertés privés que la France, ou en tout cas suffisamment éloigné de la juridiction française pour que toute tentative d’obtention des logs provoque un bel enquiquinement judiciaire.

Ceci en tête, on pourra ensuite se diriger vers un VPN gratuit, avec la contrainte que les débits, latences et volumes autorisés ne sont probablement pas parfaits, ou un VPN payant (on en trouve à partir de 50 ou 60$ par an, ce qui est raisonnable).

Deuxième et troisième minute

Une fois le choix fait, on installe un petit logiciel sur sa machine ou on la configure, suivant le fournisseur choisi ; on trouvera assez facilement de l’aide sur des forums ou, plus simplement sur des sites qui prêchent la bonne parole sécurisée.

Par exemple, iPredator fournit quelques explications sommaires mais suffisantes pour la connexion à leurs services. Change-Mon-Ip est un peu plus disert.

Bref, l’utilisation d’un VPN se traduit essentiellement par un peu de lecture.

Quatrième minute

Oui, je sais, j’ai dis trois minutes dans le titre et nous en sommes à quatre : en fait, c’est fini. J’ai accordé deux minutes pour lire un peu la documentation et la mettre en pratique. Au pire, grâce à l’utilisation habile de Facebook ou de Twitter, on pourra :
a/ dégoter un ami
b/ obtenir quelques explications complémentaires
c/ installer un VPN avec son aide.

Dans cette quatrième minute, je vous propose de savourer le résultat : votre connexion est suffisamment protégée pour contrarier les retardataires du net qui tentent, encore et encore, de le contrôler alors qu’ils sont infoutus de simplement retenir une adresse mail sans faire d’erreur.

En début de billet, j’expliquais que nos spécialités fromagères garanties sans sucre, sans gras, sans calories et sans la moindre parcelle d’intelligence étaient idiots et contre-productifs. Avec les précédents paragraphes, vous aurez pu constater qu’il faut en effet être idiot pour à ce point manquer de discernement : les gens qui veulent conserver leur anonymat vont se précipiter sur ces solutions et ne surnageront que les personnes dont l’activité sur le net est si bénigne que leurs logs promettent d’être aussi palpitants qu’une liste de course à Carrefour.

Et contre-productifs puisqu’à part ralentir marginalement le débit d’internet pour une partie de la population, absolument aucun gain ne pourra être retiré d’une telle mesure et, pire, elle va sérieusement augmenter la quantité d’efforts à déployer pour trier les utilisateurs de VPN honnêtes mais soucieux de leur vie privée des gros méchants qui, comme chacun sait, troquent quotidiennement des photos pédopornographiques contre des plans détaillés de bombe atomique en kit à monter dans son garage.

Bref : encore un ratage magnifique et la démonstration de la nullité absolue de nos gouvernants en matières de nouvelles technologies.

Et à bien y réfléchir, tant mieux.
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