Magazine Documentaire
Source : http://www.espaceinfirmier.comJE N'AI RIEN A AJOUTER... (sauf cette magnifique musique de l'île aux rêve, ici reprise par Laurent Callens)***Comment envisager et accompagner la fin de vie d'un enfant ?
Avec tact et sensibilité, un documentaire coproduit par un réseau
d'hémato-oncologie donne la parole aux familles et aux soignants.Aujourd'hui, à l'heure de la médecine de pointe, la disparition d'un enfant relève de l'indicible, de l'impensable. « On ne peut pas être préparé à cela, on ne l'est jamais »,
résume le père de Seán, tout-petit parti trop tôt. Pourtant, on peut
accompagner ce cheminement, l'humaniser, faire des projets dans le temps
qui reste, remplir sa « boîte aux souvenirs » pour l'avenir. C'est le propos tenu par Est-ce que les doudous vont au ciel ? (1),
un film documentaire présenté mardi dernier à Paris. Coproduit par un
réseau francilien d'hémato-oncologie pédiatrique (le Rifhop) et une
équipe ressource en soins palliatifs (Paliped), il met en regard les
témoignages de proches et de soignants sur la fin de vie de quatre
enfants, en région parisienne et en province, à domicile ou à l'hôpîtal. Le
titre sonne comme une énigme. La mère de Priscille raconte comment sa
fille lui a fait passer un message, et des interrogations, sur son
départ imminent : « Est-ce que les doudous aussi vont au ciel ? » Sa mère repond : « Bien sûr qu'ils y vont ».
Mais plus que la réponse, c'est le fait même que le dialogue ait lieu
qui compte. Le film le montre bien : il est possible, et précieux, de
parler de la mort avec l'enfant et sa famille. Et l'on se rend compte
que le tabou est parfois plus dur à affronter chez les adultes. La
fin de vie est jalonnée de choix délicats. Celui du lieu (à l'hôpital
ou à la maison) fait l'objet de l'une des trois parties du film. Deux
familles choisiront l'hôpital (« Je n'aurais pas pu continuer à vivre dans la maison », assure le frère de Fanny), les deux autres le domicile (« Ce ne sont pas les infirmières qui gèrent, c'est nous. Cela aide moralement », dit la mère de Léo). Tout l'enjeu est de permettre un choix éclairé. Prise de reculNé
d'échanges entre parents et soignants lors d'une journée de formation
du Rifhop, ce documentaire fait ressortir les questionnements avec
empathie, mais aussi distance et respect. L'un des deux réalisateurs,
Bernard Dal Molin, raconte l'avoir conçu pour « aider les soignants qui aident les familles ».
Auprès de ces dernières, il peut certainement être une ressource face à
l'isolement, un moyen de prendre du recul, d'aider à anticiper le
deuil. Pour les soignants, il semble un outil propice à la réflexion. Le
père de Seán raconte ainsi : « L'équipe nous a accompagnés
jusqu'au bout, les puéricultrices nous ont apporté le petit déjeuner,
nous ont aidés à charger la voiture. On sait que les soignants n'ont pas
toujours le temps. Mais ils l'ont trouvé. » Le
documentaire signale aussi certains écueils, comme la brutalité
involontaire de certaines questions : plutôt que de demander « Où préférez-vous que votre enfant décède ? », mieux vaut dire « Nous pouvons proposer telles ou telles solutions », suggère Dominique Davous, de l'espace éthique de l'AP-HP. Ce
film dépeint des prises en charge palliatives réussies. Il ne peut pour
autant livrer de réponses toutes faites, tant chaque situation est
unique, soulignait une soignante dans le public après la première
projection (2). Le visionner en équipe appelle donc une discussion, pour
confronter ces témoignages à la pratique de chacun. Sachant que, comme
l'ont dit d'autres participants, si le film est centré sur la pédiatrie,
l'humanité qui l'imprègne peut également être inspirante dans les
services d'adultes.
Nicolas Cochard 1- Est-ce que les doudous vont au ciel ?,
film documentaire de 52 minutes de Michèle et Bernard Dal Molin, sur
une idée originale du Dr Anne Auvrignon, Marie-Christine Pouveroux et
Guénola Vialle. Coproduit par le Rifhop, Paliped et Advita Productions.
Informations et commande de DVD sur le site du Rifhop. 2-
Diffusé mardi dernier à Paris, le film sera projeté le 17 mars à
Grenoble au Centre régional de documentation pédagogique et le 14 mai au
congrès de la Société française de pédiatrie, à Marseille.