A l'heure où le liseré rouge de l'aube
dilue peu à peu le bleu de la nuit
J'en profite pour sortir les poubelles
Dans leurs sacs vert aquarelle
Où s'ébattent de joyeux microbes
Heureusement j'ai gardé mon bonnet d'âme
Car des étoiles tombe de la pluie
Mais ce ne sont pas elles que je blâme
Dans la grande rue encore endormie
Une ambulance et un corbillard
Font la course pour ne pas être retard
Car le destin n'a pas encore choisi
Ce qu'il adviendra du vivant en sursis
Car à la question subsidiaire
Avez vous une complémentaire?
L'être à l'agonie a répondu argl argl
Ce n'est pas que je sois bégueule
Mais une réponse plutôt qu'un gargouillis
A la société aurait fait faire des économies
La nuit au jour a gentiment cédé sa place
Mais non sans lui faire une décapante grimace
Mes poubelles ont sauté dans la benne à dorure
Pendant que mes pensées se sont étalées sur la bordure
Quand une dame un peu trop maquillée
Me voyant sans doute guère pressé
M'a demandé si je voulais monter à l'étage
Je lui ai répondu que j'attendais un nuage
Elle m'a sourit et m'a dit qu'elle c'était un arc ciel
Mais pas aujourd'hui car il y a trop de soleil
Dans le caniveau voguent trois caravelles
Le vent a une nouvelle fois la part belle
Leurs voiles sont en dentelle
Puis elles disparaissent dans un tourbillon
Rejoindre l'autre bout de l'horizon
Je laisse passer en moi l'émotion de censure
A moi doucement je tire l'ouverture
Un chien court après le chas d'une aiguille
Pendant que la fin me titille
Sur l'avenue le corbillard roule à tombeau ouvert
Décidément aujourd'hui tout va de travers
J'entre dans la boulangerie
La boulangère est une fée
Elle me tend une baguette
En me montrant ses seins honorés
La veille au soir par son mari
Qui aujourd'hui est dans le pétrin
Ce n'est pas tous les jours fêtes
Je lui dit qu'il repassera deux mains
Il est pour moi le tenter de rentrer
Car j'ai très envie de t'embrasser
Même si tu n'es pas encore arrivée