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Pourquoi on aurait du dire non à la Turquie

Publié le 01 mars 2011 par Nicolas007bis

CarlosA l’occasion de la visite éclair de Sarkozy en Turquie (lamentable erreur politique soit dit en passant), Alexandre repose la question de son adhésion à l’Union Européenne pour dire en résumé, qu’à son sens ce serait une grossière erreur que de claquer la porte au nez de ce pays.
Même si je ne partage pas tout à fait son point de vue, j’invite évidemment à la lecture de son excellent billet dans lequel on peut trouver quelques arguments avec lesquels je suis plus ou moins d’accord dont notamment celui-ci qui me parait particulièrement pertinent: « Nous avons l’occasion unique d’inciter un grand pays comme la Turquie à changer ses institutions, à se démocratiser, à abandonner ses mauvaises pratiques, à se prémunir contre le risque d’un État dominé par le facteur religieux, à faire une plus grande place aux droits de l’homme, et nous la gâcherions ? »

Je pense que nos points de vue ne sont pas fondamentalement différents même si nous n’aboutissons pas tout à fait à la même conclusion. Comme j’ai déjà écrit là dessus, je ne vais pas me casser le tronc et me contenterai de reprendre les grandes lignes d’un précédent billet, agrémenté des différents commentaires que j’ai pu faire notamment chez Xerbias qui s’est également à plusieurs reprises prononcé sur le sujet.

Je me suis donc déjà exprimé sur ce sujet via un superbe petit billet dont le titre en synthèse en donne d’entrée le ton « Pourquoi il aurait fallu (aimablement) retoquer la Turquie ? »
En apparence donc, exactement l’inverse de la thèse d’Alexandre. En apparence seulement car l’emploi du conditionnel passé forme 1 du verbe falloir est important dans ce titre.

Dans ce billet, cet extrait synthétise bien mon point de vue : « Je crois donc fondamentalement que la question de l’adhésion de la Turquie dépend à la fois de l’idée que l’on se fait de l’Europe et de l’espoir que l’on y met. Si, comme le souhaitent certains, l’Europe n’est destinée à rester qu’un conglomérat de pays formant une vaste zone d’échanges privilégiés, alors pourquoi ne pas y intégrer la Turquie comme d’ailleurs l’Ukraine, Israël ou le Maroc s’ils le souhaitent !

De même, si comme Michel Rocard, partisan affiché de l’adhésion de la Turquie, on considère qu’une Europe fédérale serait une bonne chose mais qu’elle n’est malheureusement qu’une illusion, alors effectivement, il faut se contenter d’une Europe sans autre ambition que de constituer une zone de stabilité la plus large possible et à laquelle on peut arrimer la Turquie !

Par contre, si on veut aller beaucoup plus loin vers une Europe fédérale qui s’organise autour d’un vrai projet, dans ce cas, cela exige une capacité et une volonté d’intégration de chaque pays extrêmement forte et nécessairement de donner à cette Europe une limite. Or on le voit, il est déjà extrêmement difficile de s’entendre sur ce que doit être l’Europe, avec des Tchèques, des Polonais ou des Anglais, alors si on rajoute les Turcs par-dessus c’est, au mieux, l’immobilisme assuré et au pire les crises permanentes ! »

Voilà, voilà, l'art de recycler un billet !

Néanmoins, ces propos ne justifient pas mon titre et notamment l’emploi du conditionnel passé forme 1 du verbe falloir. Si je m’étais arrêté là j’aurais utilisé le présent et intitulé mon billet « Pourquoi il faut (aimablement) retoquer la Turquie ? », en fait je le concluais en disant en substance que pour les raisons évoquées plus haut il aurait fallu mais que puisque ce n’a pas été fait, et qu’au contraire des promesses inconsidérées ont été faites, il fallait du coup peut-être éviter de « risquer de se mettre à dos ce pays pour un bon bout de temps, et à le jeter dans des bras moins démocratiques et plus islamistes » et en conséquence les accepter et ainsi faire une croix sur « ce que je considère comme une belle idée de l' Europe…à laquelle j'aurais voulu encore croire» !

Alexandre et d’autres nous rétorqueront « mais, non, ce n’est pas la mort de l’Europe fédérale, celle-ci se fera simplement autour d’un petit noyau de pays dont la France et l’Allemagne ! »... je n’y crois pas trop à cette Europe à 2 vitesses !...la superposition de 2 instances multiplierait les législations, complexifierait les relations avec l’extérieur et rendrait l’Europe encore moins lisible pour les populations !

Une Europe concentrique ne peut s’imaginer que sur des projets communs ou des législations bien ciblées à propos desquels des partenariats privilégiés seraient mis en place, une sorte de « Communauté européenne du charbon et de l'acier » qui nous ramènerait 50 en arrière !

Ainsi, je me retrouve dans une position intermédiaire entre celle d’Alexandre et de Xerbias, considérant d’un coté comme important d’amarrer d’une manière irréversible la Turquie à une organisation laïque et démocrate, et de l’autre que « l’adhésion de la Turquie porterait le coup de grâce de la construction européenne, il ne faut pas en douter » !

Ma conclusion de l’époque marquait plutôt une forme de résignation, du genre « puisqu’ils ont fait la connerie de promettre l’UE à la Turquie, il faut assumer maintenant quitte à enterrer l’Europe »…je ne reste qu’à moitié sur cette position, j’ai de plus en plus de mal à accepter la transformation de l’Europe en un énorme gloubiboulga ingérable, une Europe qui dans une fuite en avant sans fin, grossirait grossirait jusqu’à éclater comme la grenouille de la fable.

Je persiste à penser qu’il aurait fallu dire non à la Turquie il y a 45 ans et que plus ça va, plus il sera difficile de les renvoyer dans leurs foyers.

Mais en tout état de cause, si turcs il doit y avoir, cela ne peut être sans plusieurs conditions sine qua non !

Outre ce qui est demandé à la Turquie, et contrairement à ce qui est prévu, les conditions de son adhésion à l’UE ne doivent pas uniquement peser sur la Turquie.

De nombreux préalables institutionnels et organisationnels doivent être mis en œuvre par l’UE avant que la Turquie n’intègre ne serait-ce qu’un doigt de pied !

Il est en effet essentiel de construire une Europe qui soit capable d’encaisser le choc provoqué par l’arrivée d’un pays de 80 millions d’habitants sans imploser !

Autre condition qui me parait également essentielle, c’est obtenir l’adhésion des populations européennes puisque la Turquie serait le premier pays à toquer à la porte de l’UE, qui n’est européen ni de par sa géographie, ni de par sa culture, ni de par son histoire, ni de par ses traditions ni de par sa religion !

Il me semble que la moindre des choses dans ces conditions, si on ne veut pas éloigner encore un peu plus les populations de l’Europe, c’est de leur demander leur avis !

Pour le coup, une fois n'est pas coutume, il me semble qu'un referendum populaire s'imposerait !


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