Un à un, les peuples arabes se
soulèvent, du Maghreb jusqu’au Golfe, en passant par le Proche-Orient. Si les situations sont souvent très différentes sur place, ces révolutions en cours sont marquées, en plus de leur
simultanéité, par une volonté forte d’accéder enfin à la liberté, à la justice sociale, à la démocratie et au progrès. Ce mouvement historique est aussi important que la chute du mur de Berlin ou
les attentats du 11 septembre 2001, tant il modifie en profondeur l’appréhension géopolitique de la démocratie.
Si les dictatures sont renversées une à une par leur peuple, il est indispensable de se poser la question de savoir comment nous en sommes arrivés là. Si la soif de pouvoir et la folie de
quelques hommes ont permis l’existence de ces régimes autoritaires et kleptocrates, la responsabilité des pays occidentaux doit aussi être posée. Ainsi, des gouvernements et de grandes
multinationales ont longtemps considérés ces Etats comme de grandes stations-services, où ils s’assuraient un libre accès aux ressources naturelles en échange de la fourniture de matériel
militaire et d’une légitimation internationale ; le tout en laissant libre court à la politique des dirigeants hôtes tant que la pompe reste ouverte.
Mais aujourd’hui, la combinaison de l’envolée des prix des produits alimentaires et du chômage de masse des jeunes, à laquelle il faut ajouter l’émergence des réseaux sociaux numériques comme
catalyseur de la mobilisation et nouvel espace de liberté, a permis la création d’une mobilisation massive contre ces dirigeants et de briser ainsi les barrières de la peur.
La realpolitik remise en cause, nous devons tracer les lignes d’une nouvelle politique étrangère.
Ces révolutions doivent être pour la diplomatie française, comme pour celles de nos voisins, le signal d’un changement fort de paradigme. A trop avoir été l’instrument d’une diplomatie du
contrat, qu’il soit industriel ou militaire, et qui a trouvé son paroxysme avec la Présidence Sarkozy, à trop avoir donné dans le relativisme culturel en considérant qu’un peuple devait être «
mature » avant de pouvoir accéder à la démocratie, à trop avoir vu ses moyens budgétaires réduits, le jeu du Quai d’Orsay sonne faux dans le concert des Nations. Autant de fausses notes que le
souvenir de la tente de Kadhafi dans la cour de l’Elysée, que les déclarations de Michèle Alliot-Marie au moment même de la révolution tunisienne et que ses vacances en Tunisie, celles de
François Fillion en Egypte et de Nicolas Sarkozy au Maroc.
Nous n’acceptons pas ce dévoiement de la politique étrangère de la France. Elle doit aujourd’hui radicalement changer à la lecture des évènements arabes. Ainsi, elle doit opérer un changement
majeur : être à l’écoute des mouvements sociaux et soutenir partout la démocratie et les droits de l’homme. Partout, c’est à dire également en Afrique, qui, pour souffrir des mêmes maux, pourrait
connaître les mêmes soulèvements que le monde arabe.
Ces valeurs, que notre pays a adoptées et dont il s’est érigé en gardien dès 1789, doivent être le nouveau compas de notre diplomatie. Leur défense et leur promotion sont le socle de la vision
que nous avons de la place de notre pays dans le monde.
Ce changement de modèle est ambitieux. Nicolas Sarkozy n’est plus qualifié pour le mettre en œuvre. En 2012, les socialistes porteront l’alternative aux échecs et aux dévoiements de la droite en
matière de politique étrangère.
Source : MJS