Acculé à procéder à l’exfiltration de MAM du bourbier d’Orsay, Nicolas Sarkozy a profité de l’occasion pour donner un tour de vis au gouvernement. En souvenir de son poste longtemps occupé de Ministre de l’Intérieur, le Chef de l’Etat a recours à une politique des grands frères à travers les personnes de Claude Guéant et d’Alain Juppé. Entre respectivement un “commissaire politique” et un “vice-président”, le rôle et la marge de manœuvre de François Fillon sont marginalisés.
Gouverner c’est prévoir. Gouverner c’est surprendre. A défaut d’avoir suffisamment pris en compte les mouvements telluriques qui secouent le monde arabe, l’Elysée prend l’option de surprendre. Le remaniement opéré par Nicolas Sarkozy témoigne d’une faiblesse qu’on ne lui connaissait pas.
Derrière ses coups de menton et ses claquements de talon, le président, prisonnier d’un affect surdimensionné, donne l’impression d’avoir les plus grandes difficultés à trancher là où il faut, quand il le faut. Incapable également d’élargir et de renouveler son cercle de fidèles qui après l’avoir mené à l’Elysée, le conduisent vers la sortie.
Fillon, Hortefeux, Guéant constituent une Trinité aux allures de boulet. Le Premier ministre, combien de divisions ? Peu de choses, la majorité présidentielle s’est désormais rangée derrière un Jean-François Copé qui attend patiemment son heure.
De son côté, Brice Hortefeux, l’ami fidèle a surtout fait preuve de son incapacité à trouver dans les fonctions ministérielles une dimension autre que celle d’homme des basses-oeuvres. Son bilan est désastreux et visible.
Tel n’est pas le cas de Claude Guéant. Surnommé le Cardinal, ce haut fonctionnaire présent aux côtés de Nicolas Sarkozy depuis 9 ans est très largement responsable de l’échec de la vison sécuritaire de son mentor qui en endosse seul la responsabilité politique.
Incapable de faire la grande lessive et à s’entourer de conseillers mieux inspirés dans la perspective de 2012, le Chef de l’Etat bricole et donne à la France un gouvernement de bric et de broc qui augure d’affrontements souterrains violents. Trois chefs, dont l’œil de l’Elysée, c’est deux de trop.
Nicolas Sarkozy gâche sa meilleure cartouche, celle d’Alain Juppé, en n’en faisant pas son premier ministre. Et pour cause, l’intéressé salué à droite et à gauche pour sa carrure d’homme d’Etat, se refuse d’être la marionnette du Prince et de ses conseillers. Seul bémol dans le concert de louanges dont il bénéficie, Daniel Schneidermann, rappelle les errements passés du maire de Bordeaux. Le temps il est vrai, lui a offert une nouvelle virginité.
Dans ce contexte, le demi-remaniement annoncé dimanche soir, dans une théâtralité aussi inédite qu’inappropriée, est condamné à se traduire par des demi résultats. Car gouverner, c’est aussi savoir trancher.